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31 décembre 2004

Geen faciliteit !...

Les partis francophones face à leurs homologues flamands sont parfaitement lamentables.
C’est qu’ils croient pérenniser la Belgique en faisant de plus en plus de concessions. En face, ils n’ont qu’un objectif : sortir de cet Etat dont ils croient qu’une majorité de Flamands ne veut plus.
Pour se débarrasser du paquet cadeau, on devient absolument odieux avec ceux qui vous supplient de le conserver.
Les Flamands, chez eux, iraient jusqu’à mettre au coin des rues des poteaux de signalisation – ça se fait déjà dans les musées – en anglais, en espagnol et en allemand… sauf en français !
La dernière exigence des « geen faciliteit », une Chambre flamande du Conseil d’Etat vient d’en avoir l’idée, en refusant de déclarer illégales les fameuses circulaires Peeters et Martens qui restreignent les facilités linguistiques.
Voilà le mirobolant édifice des concessions du stratège Elio Di Rupo qui part à la casse. L’annonce faite après cinq jours de retard du porte-parole flamand du ministère de l’Intérieur de cette mauvaise nouvelle pour la périphérie bruxelloise, en dit long sur l’état de perplexité des instances gouvernementales.
Les Flamands commenceront bien l’année.
On pensait que les inondations sur nos terres asiatiques de vacances allaient pouvoir contenir le tsunami flamand qui manœuvre pour submerger Bruxelles, il faut croire que le Vlaams Belang a trouvé le moyen de pousser la Flandre à la surenchère et qu’il surfera bientôt sur les mêmes vagues que le VLD, le SP et le CVP.
Ces circulaires, prises en 1997 et 1998 par le gouvernement flamand, interprètent les facilités linguistiques accordées aux francophones dans un sens particulièrement restrictif. Elles imposent de demander la traduction en français d’un acte administratif à chaque fois que les francophones en recevront un. La traduction ne sera plus systématique. Ces décisions ont suscité une vive polémique entre partis francophones et flamands. Aux yeux des premiers, cette circulaire revient en effet à vider les facilités linguistiques de leur contenu et est contraire à la loi.
Les gouvernements de la Communauté française et de la Région wallonne, ainsi que des particuliers habitant les communes à facilités, avaient introduit à l’époque des recours devant la chambre bilingue du Conseil d’Etat. Les recours émanant des exécutifs francophones ont déjà été rejetés, le Conseil d’Etat estimant qu’ils n’avaient pas intérêt à agir. Il restait ceux des particuliers. En mars 2001, ils ont été renvoyés devant une chambre flamande. En juin 2002, l’auditeur a rendu un rapport favorable aux requérants puisqu’il préconisait l’annulation de la circulaire. Il confirmait de la sorte l’avis rendu par l’auditeur de la chambre bilingue en mars 2000. La semaine passée, le Conseil d’Etat n’a donc pas suivi ces deux avis.
Reste la scission de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

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Si elle est consommée dans le courant de 2005, comme il est vraisemblable, les Flamands, par haine de leur minorité francophone seront prêts pour les pires décisions à la Slobodan Milosevic.
Restera à organiser la chasse aux « fransquillons » pour avoir les premiers morts.
Comment peut-on être un Flamand pointu à l’heure de l’Europe ?
C’est un mystère.
On a trop souvent évoqué le « complexe » d’une langue flamande peu parlée dans le monde, sans culture comparable au français. Je me demande si c’est bien le cas ?
A force de prendre les Wallons pour des lavettes, je me pose la question de savoir si les Flamands, tout au moins leurs dirigeants, n’ont pas la grosse tête à force de se croire supérieurs en tout aux Wallons ?
Il règne chez une bonne partie des Flamands une singulière attitude de revanche par rapport aux événements de la guerre de 40-45, lorsqu’une certaine jeunesse de Flandre revenait dépitée de sa déconvenue du front de l’Est, et cachait dans le poulailler familial les uniformes SS et la photo de leur führer, avec leur honte !
Tout pourrait-il venir de ces événements déjà lointains ?
Les nostalgiques du temps d’Adolphe sont-ils à présent majoritaires ?
On se pose la question. Et c’est, malheureusement toujours le Vlaams Belang qui répond
à la place des autres.
Ce qui est dangereux, c’est que cette haine qui suinte des têtes pensantes du Nord risque de déteindre sur des Wallons qui jusque là mangeaient la luzerne dans les prés avec leurs vaches et se précipitaient au coup de klaxon du premier flamand aperçu sur la route de la Baraque pour expliquer, avec les trois mots de leur pauvre vocabulaire thiois, quel chemin emprunter pour skier en Fagne.
Ah ! nous sommes bien peu dignes dans ce conflit. Il ne faut pas aller chercher plus loin notre défaite future.

30 décembre 2004

Gigue et Rigodon

Rassurez-vous, je ne vais pas emboîter le pas des journalistes qui se sont rués sur les informations des événements qui ont ravagé huit pays d’Asie. La trêve des confiseurs n’offrira pas cette année, le spectacle désolant d’une information champagne-caviar.
Résumé des rédactions en heure sup : Une vague isolée et très haute créée par l’onde de choc d’un séisme sous marin pénètre profondément dans les terres. Le terme japonais servant à désigner cette vague de grande dimension est « tsunami ». Mais cela vous le savez déjà.

Il est certain qu’il faut aider les populations sinistrées par tous les moyens dont les pays riches disposent. Ceci n’est donc pas une critique de l’aide qui est bien nécessaire à des millions de pauvres gens.

Cela étant, quelques remarques s’imposent.
Les pays sinistrés sont des dictatures, certaines à majorité musulmane. L’Inde est la grande nation de religion hindouiste, tout à fait à part. Ce pays a d’ailleurs renoncé à l’aide internationale.
L’année dernière le séisme en Iran nous avait déjà montré les faiblesses de ces régimes dirigés par des religieux ou fortement imprégnés de religion. Incapable par son orientation tournée vers la spiritualité et l’intransigeance, cette formule d’Etat-croyant vient de faire une nouvelle fois la démonstration de son mépris des foules. La capacité à prévenir les calamités de ce genre, semble au-dessus de leurs compétences.
La pauvreté des autochtones est considérable et le tourisme est un moyen de faire rentrer des devises de ces pays à l’économie en dents de scie. Quand on voit les infrastructures des abords touristiques, le luxe des hôtels, le confort et l’aisance qui s’y conjuguent, on est surpris qu’en quittant à peine de quelques centaines de mètres les lieux « fréquentables », de voir la grande misère des pêcheurs et des populations qui ne tirent aucun revenu de cette insolente abondance.
Il ne faut pas être grand économiste pour s’apercevoir que les populations locales n’ont que des salaires de survie. Cela ne vaut pas le coup d’entretenir les gens de pouvoir, les imams, les chefs de guerre, les intégristes et les investisseurs saoudiens, s’ils ne sont pas capables de réinvestir dans le social.
Il aurait été de la plus élémentaire prudence que les responsables de ces pays aient pris, depuis longtemps, langue avec les Japonais qui ont un système de prévision et de sécurité vraiment efficace les avertissant des tsunamis, ne serait-ce que pour préserver l’industrie hôtelière.
Il faut rappeler que les hôtels des plages sont les plus chers et les mieux adaptés à la clientèle riche. Il y aurait une parabole à tirer du fait que les friqués aient dégusté avec les plus pauvres.

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Après la parabole, la fable. Elle se déroule sur les aéroports où l’on voit les charters de l’aide humanitaire débarquer des colis et repartir chargés de touristes blessés qui ont tout perdu dans l’aventure, et le flot nouveau des vacanciers, l’appareil photo sur le ventre, en short et paréo, l’air heureux et se foutant complètement du flot remontant, aidés en cela des agences touristiques pour qui le nouvel an constitue un autre tsunami, d’or celui-là, des comptes en Suisse.
Le personnel humanitaire déchargeant ses sacs de riz et les bouffis de l’abondance en train de leur roter dans la gueule, on se demande pour rater cela, ce que font les grands reporters ?
Les séismes, les cataclysmes naturels nous ramènent à la juste hauteur de ce que nous sommes. Nous dansons sur des continents qui ne reposent pas sur l’eau, mais sur les millions de degrés du magma. C’est une cocotte minute. Les expulsions d’énergie sont sans limite et sans aucune prévision possible à long terme. La nature nous envoie des chiquenaudes qui ont sans doute valu à l’homo sapiens d’avoir perdu des centaines de millions de vies. L’homme, cependant, à lui seul, si l’on cumule ses guerres et ses génocides en a fait bien davantage. Les Arméniens, les Tutsis, les Juifs et les Palestiniens ne sont que des hors-d’œuvre de notre savoir faire.. Avant, il y eu Adolphe et ses camps, Pol Pot, Napoléon, les guerres de religion, Gengis Khan, Jules César, Alexandre, Nabuchodonosor, etc. Les guerres n’ont pratiquement jamais cessé depuis l’âge de pierre. Alors que l’on s’esbaudisse de « la fureur des éléments », tant qu’on veut, si cela peut attendrir les détenteurs des gros porte-monnaie, mais qu’on n’oublie pas tout de même ce dont nous sommes capables. A côté de nous, les démons de l’invisible ont beaucoup à apprendre.

29 décembre 2004

Une passion pour laquelle on ne se sent plus fait

J’essaie d’écrire quelque chose de conventionnel et de gentil à l’occasion de l’année nouvelle, et je ne le trouve pas. Je ne sens pas la présence de la seule personne auprès de laquelle j’ai envie d’être. J’en suis désemparé. Il n’est guère que la passion qui transforme à coup sûr le plomb vil en or. Mon cabinet d’alchimie a fermé ses portes. Dieu sait quand il rouvrira !
J’ai un vague espoir pour mardi, le premier de l’année prochaine. Mais, va savoir ?
Peut-on se jouer soi-même ? Paraître détaché, c’est ce qu’on appelle donner le change. Mais se mentir ? Je n’y suis pas encore arrivé. Je m’applique.
Le détachement fait barrage aux mots appropriés que l’on dit d’une traite quand la passion vous pousse.
On est presque de l’autre côté des choses par le détachement, dans un no man’s land où même la haine est neutre.
L’on conquiert le droit de parler d’amour sans ambiguïté à la femme que l’on aime rien que par l’évidente sincérité des sentiments, à l’expression du visage. Pour tout autant qu’elle-même soit sensible à cet amour, même un bègue deviendrait éloquent. C’est feindre qui exige du talent. Une femme à qui l’on dit sans ambages qu’on la désire, alors qu’on n’en pense rien, est rarement dupe, même si le gredin qu’elle a devant elle lui est sympathique.
Hélas ! pour la morale d’une histoire qui n’en a pas, ce ne serait pas la première fois qu’une femme se laisserait tenter par un gredin sympathique, tout en n’étant pas dupe !
Ecrira-t-elle d’ici la semaine prochaine ?
Rien n’est moins certain.

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Ce serait la première fois qu’elle m’écrirait.
La première lettre est toujours troublante. Les femmes qui écrivent pour la première fois à un homme qui ne leur est pas indifférent, ont une manière bien à elles de se refuser à l’avance de ce qu’on ne leur demande pas, ou pas encore.
Il y a un ton dans tout cela qui n’appartient qu’aux femmes. C’est ainsi qu’elles ont toujours brillé dans l’art épistolaire. Sauf Flaubert dans ses lettres à Louise Colet, tous les hommes tombent, tôt ou tard, dans l’afféterie.
Permissive society. Voilà que le relâchement général me pose déjà en parangon. Que fait-elle ? Que dit-elle et à qui ?
Cela me ramène dix ans en arrière, à Yuste. Nous visitions la dernière demeure de Charles Quint. Au moment où nous passions devant la chaise à roulettes de l’empereur, des visiteurs sortaient encore de la petite chapelle attenante. J’eus l’impression désagréable que le groupe auquel nous appartenions avait perdu Fátima, celle pour qui j’avais fait dix voyages à Coria sur très peu de temps. Il était inutile que je me retourne. Elle ne descendrait pas les marches de la chapelle comme le début du groupe venait de faire. Pendant le reste de la visite, je n’osai pas me retourner de peur que son absence se confirmât.
Ce n’était pas par lâcheté, mais par un désir vague de repousser le plus tard possible, cette éventualité.
Cette intuition ne m’avait pas trompé.
Elle m’attendait sur la terrasse au-dessus du jardin des moines. A la chapelle, l’odeur de l’encens, le confinement avec le contraste de la chaleur étouffante du dehors, l’avait laissée comme étourdie. Les gardiens l’avaient fait asseoir. Puis, on l’avait conduite sous le porche à l’abri du soleil, où elle m’attendait.
Comment expliquer cette sensation d’absence ?
J’ai la même impression aujourd’hui. De n’avoir aucune information sur une disparition est toujours possible. Quoiqu’il n’est que trop évident qu’il ne faut guère chercher les motifs : absence d’intérêt, confusion des genres, on n’aime ou on n’aime pas, c’est toute la problématique.
Je me connaissais mal.
Je me croyais trop désabusé et trop las pour me livrer à des sentiments extrêmes comme l’inquiétude amoureuse, qu’il ne faut pas confondre avec la jalousie, qui serait dans mon cas, parfaitement ridicule.
C’était une erreur.
Tout cela ne me rassure pas. Je croyais avoir raccroché mon sac et que c’en était fini de bourlinguer. Il suffirait qu’elle me dise que les Nuits Blanches commencent en juin à Saint-Pétersbourg, pour que je m’inquiète déjà du départ.
J’aurais l’air enthousiaste du voyageur qui n’en a jamais assez, alors que je me maudirais intérieurement de repiquer au truc.
Quel étrange animal, on fait !

28 décembre 2004

T’as les bons voeux de Richard pour 2005.

- On pense relier la Chartreuse à la Citadelle par un grand pont qui passerait au-dessus de la place du Marché, en 2005 !...
-Mais c’est horrible !
-Oui, mais les Liégeois vont adorer ! Le plus long pont sans arche du monde…
-Tout de même, la maison communale, sous le pont, sans soleil !
- Plus de frais de toiture, puisqu’il ne pleuvra plus en dessous ! Les Liégeois en seront fous… Mais, ce n’est pas tout, le canal de la Dérivation est un cloaque. On va le recouvrir d’une dalle. Ainsi la circulation sera plus fluide quai de l’Ourthe.Les caravaniers hollandais au lieu de passer sous les fenêtres des riverains, passeront dix mètres plus loin. Toujours en 2005 !
-Qu’y aura-t-il de changé ? Et puis ce sera affreux, l’autostrade…
- Oui, mais les Liégeois vont adorer, l’autoroute à douze bandes de circulation, comme à Broadway ! Tous les rats de la ville concentrés sous la dalle… la joie des dératiseurs. Les Liégeois vont sauter de joie…
- On se croirait revenu sous le règne de Destenay, le bâtisseur…Qu’est-ce qui fait dire que les Liégeois aimeront ça, en 2005 ?
- Dites, on ne me la fait pas. Je connais les Liégeois, j’en suis un. Tout ce qui est kitch et de mauvais goût, ils adorent…ça, bien avant 2005. On va construire le railway suspendu sur coussin d’air de Herstal aux Guillemins. C’est prodigieux, un rail de béton de 10 kilomètres avec une pile tout les cent mètres….
- Toujours prévu pour 2005 ? Ce rail passera sous le pont suspendu ?
- Evidemment. Il sera à la hauteur du deuxième étage de la maison communale. Il ne gênera pas la circulation place Saint Lambert. Au contraire. Les Liégeois vont adorer.
- Si c’est vous qui le dites !

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- Oui, ils aiment le grandiose. Regardez la nouvelle gare des Guillemins qui sera inaugurée en 2005. On a été trop peu audacieux. Une dizaine de mètres en plus en hauteur et le toit de la gare touchait au monument Interallié de Cointe. Vous vous rendez compte de l’effet prodigieux ! Les Liégeois auraient été épatés agréablement…
- Ainsi la gare aurait ressemblé à un gigantesque casque à pointe, histoire de rappeler la Grande Guerre, en 2005 ! Comme coup d’œil, c’est un sacré coup… Vous les croyez si peu amoureux du beau les Liégeois ?
- Qu’est-ce que le beau, sinon ce à quoi l’œil s’habitue ? C’est ainsi que le monument des Contributions rue Paradis…
-Cet horrible machin noir ! On dirait la Kaba de La Mecque !...
- Justement. Nous allons jouer sur la ressemblance. Nous allons en 2005 mettre le bâtiment en valeur au lieu de le cacher. Nous aurons des projecteurs qui l’éclaireront de jour comme de nuit avec des rappels sonores de l’Islam pour plaire à nos immigrés musulmans…
- Ça, je ne crois pas que nos Liégeois vont adorer en 2005 et même après…
- Au contraire. Le bâtiment sera ainsi intégré à notre patrimoine. Ce sera un lieu de promenade…
- On fait le Hadj en tournant 7 fois autour du Kaba. Vous n’allez pas me dire que vous allez forcer les Liégeois à faire 7 fois le tour des Contributions avant d’y déposer leur déclaration d’impôt ?
- Le Liégeois adopte facilement les coutumes des autres. Regardez comme ils se sont habitués à vivre à l’américaine, à écouter les musiques anglo-saxonnes, à fêter Halloween et Thanksgiving, à fréquenter les jeunes personnes venues des pays de l’Est et manger du poulet moabé… Ils sont au contraire formidables d’adaptation… Ils vont adorer.
- Si c’est vous qui le dites… Reste que tous ces changements pour 2005, c’est pire qu’horrible… C’est… Je ne trouve pas les mots…
- Justement, ne trouvant plus les mots, les Liégeois vont changer de vocabulaire.
- C’est déjà fait… Ils n’ont pas attendu 2005..

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- Mais plus radicalement. Dès le premier janvier de 2005, on va se mettre à l’anglais, mais là, sérieusement. Tous les papiers officiels seront dorénavant rédigés en anglais. Ce sera plus facile pour les étrangers. Nous avons un retard à combler par rapport aux Flamands.
- On a commencé, puisqu’au palais, des prévenus la tête pleine de littérature anglo-saxonne appellent les juges votre Honneur…
-Les discours de l’échevin Magotte en anglais, ce sera l’apothéose d’une carrière…
- …vouée à l’incompréhensible… les Liégeois vont adorer…
- D’autant qu’on s’est défait du wallon. Ne reste que le français.
-On y va, on y va… Ce sera superbe en 2005.
-A propos comment dit-on Tchantchès en anglais ?

27 décembre 2004

Revue de fin d’année et prévision…

Après le souper en famille de Noël, les paillettes et les bulles du jour de l’an,
les futurs rhumatisants vont se jeter dans le bassin des fontaines de Trafalgar square à Londres. Les Liégeois vont adorer les bons mots de nos grands artistes de la télévision et Patrick Sébastien, en smoking, va entonner ces merveilleuses chansons, si pleines d’entrain et de bonne humeur, qu’il faudra changer de chaîne pour arrêter de rire. Le pape aura enfin fini son homélie de Noël en 642 langues et 322 stations, une nouvelle page s’ouvrira sur la montée en puissance de son pontificat.
Augusto Pinochet, un instant défaillant à l’annonce de son inculpation, va consulter son médecin-avocat pour la prolongation de son arrêt de responsabilité pour cause de gâtisme simulé. Des détecteurs surpuissants de la CIA placés dans la dinde que Bush ira découper en Irak pour ses GI exploseront par inadvertance, mais feront moins de morts que si la chose avait été amorcée par Ben Laden.
Madonna donnera naissance à un enfant dont les premiers « re » feront un disque d’or chez Barclay. Michael Jackson, convaincu de pédophilie sera finalement relaxé quand ses avocats auront prouvé que l’âge mental de leur client n’étant que de 7 ans, les attouchements seront devenus des jeux entre enfants, fort répandus aux USA et ailleurs.
Le Congrès du Vlaams Belang de participation au gouvernement flamand se déroulera à Nuremberg, comme il se doit. A la retraite aux flambeaux, 10.000 scouts des jeunesses de Flandre seront précédés des lanceurs de drapeaux et de 100 tambours. Monsieur Verhofstadt déclinera l’invitation en qualité de premier ministre, mais sera là en tant que membre du VLD.
Pour ne pas froisser le pays d’accueil, le discours final sera en langue allemande.
La nouvelle de la scission de Hal Vilvoorde de la région bruxelloise tombera au milieu d’un discours de Laurette Onkelinx qui affirmera avec force le contraire. Les facilités étant retirées aux francophones, on envisagera un pont aérien pour rapatrier ceux qui auront été victimes des nouvelles circulaires. Zaventem ayant refusé l’accès de ses pistes à ce nouvel Exodus aérien, l’avion sera dérouté sur Beyrouth au Congrès de la francophonie d’où le président Chirac viendra pour les accueillir sur le Tarmac avec le discours à peine remanié de Christian Chesnot et Gorges Malbrunot, eux-mêmes tombés entre les mains d’un mouvement nationaliste irlandais qui réclame la même somme d’argent que les précédents ravisseurs irakiens.

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Ayant retrouvé miraculeusement des spermatozoïdes de Jacques Mesrine en parfait état de conservation dans le gros colon d’un ancien détenu de Fresnes récemment décédé, il a été expérimenté une fécondation accélérée d’un ovaire de Ma Barker conservé dans le formol à Saint-Quentin où elle avait été exécutée. L’enfant ayant vieilli de 20 ans sur 15 jours, il s’est échappé de la clinique où avait lieu l’expérience en tuant trois infirmières, un psychiatre et une passante quelques temps après au Bois de Boulogne. Une enquête est en cours.
Un individu en costume de Mickey a été arrêté sur l’autoroute E40 alors qu’il s’apprêtait à détériorer un cuberdon de signalisation en se l’enfonçant dans le fondement. Il s’est enfui 5 minutes plus tard en aspirant une matraque et un fusil à pompe par le même orifice. L’inspecteur Della Fistule a été légèrement contusionné. Mais que fait la police ?
Les Corps constitués et les plus hautes personnalités de l’Etat ont visionné le départ filmé de l’armée des Indes de Lord Mountbatten à la déclaration d’indépendance de ce pays. Après s’être querellé sur la façon de plier le drapeau belge, on s’est finalement mis d’accord d’en faire huit plis, plus un surplis pour la beauté de l’ouvrage. La déclaration idoine de la Flandre et la fin de l’Etat belge aura lieu sur le Canal du Centre à la poupe du Mercator acheminé depuis Ostende pour le grand Final ! Les troupes flamandes seront ensuite massées à la frontière du côté d’Arras à cause d’un différend entre les autorités françaises et flamandes au sujet de quelques communes revendiquées par ces derniers.

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Le dîner de réveillons chez ma tante a été le théâtre d’une expérience intéressante. On s’est aperçu à la fin du repas qui s’est effectué sans qu’aucun des convives n’ait prononcé une seule parole, que la vie est courte, mais que l’ennui l’allonge. A la suite de ces travaux, il a été proposé que l’expérience soit reconduite en 2006, tant que, ce qui a été démontré prouve limpidement que la longévité des membres de cette famille n’est pas le fruit du hasard.
Il sera exposé vers février 2005 une collection de meubles modernes appartenant au mobilier national, dont une collection superbe de bureaux ayant agrémenté les cabinets de la ministre Arena durant ces deux dernières années. Ils seront ensuite vendus aux enchères en faveur des architectes d’intérieur nécessiteux.
Après le pays coupé en deux, des divisions supplémentaires ont divisé le pays en quatre. En Wallonie, Elio I contre Elio II, s’est terminé par un match nul 3 – 3 à Sclessin. Le roi réfugié à Quaregnon a limogé les généraux Fournaux et Duquesne. Louis Michel rappelé en toute hâte compte sur les troupes de Kinshasa sous l’égide des Nations Unies pour rétablir la situation. La bataille des Ardennes a commencé. Le brouillard empêche les paras de Kolwezi de sauter sur Bastogne. Le nouveau personnel venu des Loges maçonniques liégeoises libérées a bénéficié d’un rituel allégé. Le PS se dit soulagé après que le ministre Daerden ait rendu son tablier. La Loge Robespierre a perdu la Justice à cause de la loge de la concierge truffée de micros. Enfin, quai Marcellis, on a perdu l’épée, la tête de mort et le fil à plomb, mais on a retrouvé l’équerre sous le pied d’un fauteuil ; heureusement, l’influence de ce haut lieu de la force vive est restée intacte.
Ma chatte vient d’avoir cinq chatons ; mais, c’est moi qui me suis noyé dans l’alcool afin de commencer dignement 2005 ou 2006… à vrai dire, je ne sais plus.

26 décembre 2004

A la cabane bambou

- Entre le village de Noël et le village gaulois, il faudrait trouver quelque chose pour faire la soudure.
- Histoire de ne pas démonter les chalets ?
-Entre autres, surtout pour garder une animation permanente au Centre ville.
- Oui, on ne peut pas laisser le matériel sur place après le mois de janvier en attendant juin.
- C’est à voir. Si on n’a plus de sous pour les démonter, on fait semblant de les abandonner. En deux ou trois nuits, il n’y a plus rien.
- Oui. Le Liégeois est récupérateur.
- Il aime ne rien jeter.
-D’accord, mais on n’aura plus de cabanes pour le village gaulois !
- Tant mieux. Ainsi nous donnerons du travail à nos menuisiers.
- C’est entendu. Mais si nous n’avons plus d’argent pour les démonter et les remiser, nous en aurons encore moins pour en construire de nouvelles !
- On n’en sortira pas.
-Donc restons-y et cherchons le moyen de les occuper toute l’année.
- La patinoire cathédrale pourrait servir de guinguette dès le premier mai.
- Et le parterre fleuri, qu’est-ce qu’on en fait ?
- Les ronds-points poussent comme des champignons. Les jardiniers n’auront pas de mal à liquider leurs boutures.
- Et si, après le nouvel an, on transformait les chalets de Noël en cabines de plage ?
- D’accord, mais on manque de plage.
- C’est vrai, on n’a les pieds dans l’eau que dans les trémies…
-Et encore !... par temps de fortes pluies.
- Alors, je ne vois plus qu’une solution.
- Laquelle ?
- En faire des isoloirs pour les électeurs.
- Mais, on ne vote jamais plus, ou alors rien que pour réélire les mêmes.

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- Tous les quatre ans, l’attente est longue.
- Les chalets pourraient rester pour tester les citoyens nouveaux convertis à la démocratie par l’armée américaine.
- On n’est pas en Irak.
- Non. Mais les Irakiens viendraient essayer nos isoloirs, en même temps que des observateurs discrets de la CIA vérifieraient leur capacité à aimer la démocratie.
- On pourrait vendre nos isoloirs à l’étranger !
- Il faudrait que l’on soit sûr que Bush après janvier attaque la Syrie et l’Arabie saoudite, pour une fabrication en série.
- Ce n’est pas sûr.
- Il y a quand même une chose à faire.
- Oui ?
- Puisqu’en ville les loyers deviennent tellement chers qu’une famille de 5 personnes se contente souvent d’une seule pièce, et qu’il y a autant de vieilles personnes que d’étudiants dans les kots… On louerait les chalets aux étudiants et aux vieux !
- Et quand ce sera le village gaulois en été et le village de Noël en hiver, que fera-t-on des locataires des kots ?
- Je n’avais pas pensé à ça…

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- Ils redeviendraient SDF pour quinze jours.
- Des vacances, en quelque sorte.
-Par contre, si on faisait le recensement des « cabanes au fond du jardin » des campagnes de Wonck à Ampsin, on n’aurait plus qu’à les réquisitionner pour la période des festivités liégeoises !
- Un inconvénient, les cabanes au fond du jardin sont souvent des réceptacles à merde qui servent à engraisser nos belles campagnes…
- Tu sais, les Liégeois qui n’ont pas de sou sont tellement habitués à vivre dedans, que…

25 décembre 2004

Messe basse à la Tour des finances

Parfois, des ministres importants disparaissaient en de longues neuvaines. On sait à présent qu’ils se réfugiaient dans la chapelle du second étage de la Tour des Finances, à la fois lieu de culte secret et salle de méditation.
Des gros « redevables » avaient droit d’y invoquer Saint Thomas. Ce fut le cas des héritiers qui se font tondre régulièrement par les droits de succession. Privilège exceptionnel, l’héritière du fabricant de cigarettes Lamarche, pour avoir fait confiance à la KB Lux y était passée d’un prie Dieu, directement à la prison de Saint-Gilles.
Le groupe hollandais Breevast chargé de traquer l’amiante dans les moindres recoins, découvrit la chapelle avec stupéfaction.
Un protestant stupéfait devant les ex-voto pour prolongement de la durée d’un ministère ou pour réclamer 5% d’électeurs en plus, ça doit être quelque chose !
Ainsi, dans les années soixante, on réservait un coin de prière dans certains ministères ! Et ici, ce n’était pas n’importe quel coin, 1.500 m², ce n’est pas rien. 2.000 personnes pouvaient y tenir à l’aise. Ce fort rassemblement d’ouailles prévues était bien dans la nature optimiste de l’Archevêché de Bruxelles-Malines, quand on pense qu’aujourd’hui la plupart des grandes églises du pays affichent moins de cent personnes par office !
On devait y comploter pour taxer le denier du culte, ne serait-ce que pour « rentabiliser » au cœur de la capitale de l’Europe un espace si peu utilisé.
Alertés les bâtisseurs de nos ministères ne se sentent plus de joie.
Comment, on fait des misères à notre bâtisseuse en chef Marie Arena pour 300.000 malheureux euros, alors que pour satisfaire la vocation religieuse des ministres du roi Baudouin de l’époque, on a jeté l’argent à poignée, comme pétales de rose sous les pas du divin !
Car, attention, cette chapelle, ce n’était pas rien !... On avait même prévu quelques bureaux annexes pour le curé, un vicaire et l’une ou l’autre compagne de ces âmes sensibles. Elle aurait eu droit à un coquet logement sous la délicate appellation « appartement pour une servante accorte », tout à fait adapté pour les urgences du temporel..
On savait vivre du temps de notre bon roi Baudouin.
Personne n’aurait osé soulever le moindre reproche à une ministre pour le « galbé » d’un bureau en loupe de noyer ou pour le carrare d’une cheminée supportant des chandeliers Louis XV agrémentés d’amours.
Chef-d’œuvre en péril, tout fut prestement emballé par nos bons Hollandais qui firent de ce monument retrouvé la première église en kit, à charge du secrétaire d’Etat au patrimoine, le bien nommé Kir (serait-il parent avec le chanoine ?) de trouver à ces caisses une destination pour leur désemballage.

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Chacun à sa croix, à Liège nous portons comme notre couronne d’épines, les pointus de « Mémoire de Liège », sorte de clubs de gargouilles intransigeantes et soupçonneuses qui poursuivent à la trace la moindre tuile « historique » tombant d’un toit classé, à Bruxelles, ils ont l’Association Pétitions Patrimoine qui s’en veut toujours d’avoir laissé démolir l’ancienne Maison du peuple, œuvre de Horta et le 120 de l’avenue de Tervuren.
Certains chefs de partis seraient intéressés, à commencer par Sainte Joëlle Milquet de la rue des Deux Eglises qui en verrait bien une troisième. Seule la conjoncture humaniste de son sigle l’en empêche et aussi un peu pour contrarier Nothomb, le catéchumène-militant.
Marie Arena, n’en parlons pas. Sans être sur les rangs, elle se verrait très bien dans un bureau avec vitraux et chaise curule, les saintes burettes à disposition de son chef de cabinet et de son architecte, pour les grands’messes socialistes à trois prêtres. Mais, elle n’ose pas se mettre sur les rangs, sachant combien Elio Di Rupo a toujours eu la vocation de chanoine rentrée, d’autant que le violet va si bien à son teint pâle de philosophe reclus.
Je gage que le délicieux Elio se fût servi de la résonance des décors pour en faire un moderne gueuloir à la Flaubert, afin d’y déverser ses torrents d’éloquence post-marxistes.
Dans le fond, seul Didier Reynders serait le seul à prétendre récupérer les saintes caisses. N’était-ce pas dans sa tour des miracles financiers que se firent les découvertes ?
N’est-il pas, sous des dehors désinvoltes et frondeurs d’un « ketje » liégeois, le nouveau prêtre d’une bourgeoisie libérale, mais restée secrètement chrétienne, pour les mariages et les contrats ?
L’archiprêtre Michel ayant fait scandale par l’aveu qu’il avait un fils, prêtre comme lui, de l’économie mondialiste, a été exilé dans un couvent Rond-point Schuman, c’est donc bel et bien à monseigneur Didier que revient l’emploi des caisses.
A moins que « Mémoire de Liège » n’équipe l’espace Tivoli d’un trou dans lequel on enfouirait les trésors religieux, histoire que si on parvenait à se mettre d’accord sur l’occupation de ce sol, au premier coup de pioche on arrêterait les travaux pour au moins dix années de procédure ?
Ce qui serait bien liégeois… pour des caisses bruxelloises.

24 décembre 2004

Une révolution dans l’écriture : le Richaromat !

- Qu’est-ce que tu consommes de livres ! T’arrêtes pas d’en acheter ! Tu les lis tous ?
-Aucun. La lecture, ça gâte l’écrivain.
-Tu ne lis pas, afin de pouvoir écrire sans être influencé ?
-Pas le moins du monde. Je n’écris pas non plus.
-Mais enfin… tu as bien un blog ?
-Oui.
-Richard III
-Je ne te le fais pas dire.
-Donc, si ce n’est pas toi qui écris une page tous les jours, c’est qui ?
-Personne.
-Tu ne vas pas me faire croire, que ça tombe tout seul du ciel ?
- A peu près.
-Tu as un nègre ?
-Malheureux ne prononce pas ce mot. Des incultes pourraient croire que tu es tombé dans l’injure raciste.
-Alors, explique toi.
-C’est tout simple. Tu entends le bruit de ferraille dans mon bureau juste à côté ?
-Je me demande comment tu peux dormir !
-Je l’arrête à minuit.
-A l’heure de ton blog ! Tu ne viendrais pas me dire…
-Si, j’ai inventé un robot qui écrit pour moi. Je te présente le Richaromat.
- C’est le capot d’une vieille Chevrolet !...
- Je jette les livres par cet entonnoir. Ils sont malaxés, pétris, digérés, questionnés. De l’autre bout sort le texte que je n’ai plus qu’à envoyer sur le blog.
-Alors, tes phrases amphigouriques, tes fautes d’orthographe, tes antithèses, tes antanaclases… tes variétés de pléonasme, ta périssologie…
- C’est pas moi, c’est lui !... Richaromat.
- Je suis soulagé. Je peux bien te le dire à présent, souvent je me suis demandé, si tu n’étais pas un peu cinglé ! Tout s’explique.
-Si je te disais que mon Richaromat travaille pour des écrivains parisiens !
-Non ?
- C’est comme je te le dis. Le dernier Goncourt… c’est lui. Le plus difficile, c’est quand Richaromat envoie la facture chez Gallimard ou aux Presses de la Cité.
- Qu’est-ce qu’ils disent ?
-Qu’une machine qui écrit, ça ne compte pas. Mais ce n’est pas tout. Il inspire les humoristes !
- Tu ne viendrais pas me dire que Dieudonné en papillotes et chapeau noir, son ennui avec la justice, c’est ton Richaromat ?
-Oui. Je l’avoue. Heureusement que l’autre a été relaxé. Sans quoi, Richaromat payait l’ « amande ».
(Il donne un coup de pied dans la machine)
-Qu’est-ce qui te prend ?
-La sale bête vient d’écrire amende avec un « a ». C’est un véritable fruit sec, ce bidule. Mais il a de bons moments par exemple quand j’ai besoin d’argent.
-Comment ?
-Qu’est-ce que tu crois. Quand je veux un billet de cent euros, je jette dans l’entonnoir un discours de Verhofstadt sur l’augmentation des salaires et hop, Richaromat se transforme en bankomat.
- A part l’argent, ce qui n’est pas si mal. Tu peux réclamer qu’il te sorte l’article que tu souhaites ?
-Non. Je ne sais pas d’un jour à l’autre le blog qu’il va me sortir. Je découvre comme tout le monde. L’autre jour j’étais furieux, Richaromat exagérait. Je soupçonne que le type qui a eu le capot de la Chevrolet avant moi était un homme de droite ! La preuve, Richaromat ne sait pas blairer Di Rupo, alors que moi, je l’aime bien…
-Est-ce que tu n’es pas en train de me prendre pour un imbécile ?

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-J’ai racheté à un chiffonnier un lot d’invendus de Bernard-Henri Lévy, je crains fort que la machine ponde des trucs qui ne plairont pas aux Palestiniens.
-Donc, dans un sens, tu peux influencer la machine, par l’alimentation en genre des livres que tu lui donnes ?
-Oui.
- Ça te dérangerait de lui faire avaler des Simone de Beauvoir, des Colette et des Georges Sand ?
-Non pourquoi ?
-Ainsi tu passerais… plutôt « il » passerait pour moins antiféministe !

23 décembre 2004

En v’là d’l’amour, en v’là !

On se demande pourquoi tant de haine, tant de malheurs de par le monde, alors que nous n’avons jamais été tant aimés ?
C’est vraiment pas difficile d’attendre tout de la vie et de tout recevoir : amour, fortune, santé, sans qu’il ne vous coûte presque rien.
T’as qu’à ouvrir les pages des meilleures gazettes, même celles qu’ont des actions chez Monseigneur Léonard. Faut-y être vraiment con de nos jours pour commencer une dépression nerveuse et pas la finir de suite, grâce aux dernières pages, les pages honteuses ! J’ai jamais compris pourquoi elles sont reléguées ces pages ; car, enfin, les renseignements qu’on nous y livre sont de la première importance ! Voyez, par exemple, le professeur Malan. Il résout vos problèmes qui vont de l’argent à l’impuissance, il devrait faire la Une, ce mec-là, d’autant qu’il prend des sous seulement après le résultat. Vous ne bandez plus. Bon. Vous arrivez chez Malan, vous ne douillerez sec que si Malan vous voit en pleine pénétration ! Si vous allez de Malan pis, c’est gratuit, on vous dit. Sauf le prix de la masturbation, au cas où il vous aurait fait faire des exercices dans son cabinet.

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Le professeur Sama trouve une solution à tous vos tracas. Vous avez l’huissier au cul pour traites impayées. On vous saisit les meubles, Sumo est dans la cour avec son camion. Juste avant d’ouvrir la porte à l’équipe des déménageurs, vous téléphonez à Sama. « Allô Sama, Sumo est à ma porte. » Sama doit connaître Sumo. Ce n’est pas la première fois qu’on lui téléphone pour un cas semblable. Et même si les déménageurs ont été plus rapides que votre coup de fil, c’est écrit dans le journal : « Sama est spécialiste du retour ».Vos meubles ne feront qu’un aller et retour entre la rue de la Lèche et vous !...
Vous n’avez pas confiance en Sama ? Vous en avez dix autres qui pourront vous rendre le petit service que vous demandez. Tant de mages, de voyants, de magnétiseurs, c’est qu’il y a quelque chose en eux, non ? Sans quoi, ils feraient des aigris, ils ramasseraient des coups de revolver. Certes, ils doivent avoir des listes de mécontents, des trottoirs où ils ne s’aventurent plus. Personne n’a la réussite à 100 %. C’est sûr. Cessez d’être pessimiste. Je suis certain que pour vous, c’est gagné presque d’avance.
En dernier recours, le maître N’Nessta accomplit l’impossible. Grand voyant, médium, guérisseur, ce spécialiste des dépressions, dépressif lui-même de père en fils, entrera dans votre dépression et de son combat avec la bête immonde, sortira un être nouveau, vous ! Un seul défaut, c’est la durée. Il ne sait pas voir tout de suite si vous en avez pour six semaines à le consulter ou six mois, d’où l’impossibilité de payer après résultat. Là, la consultation c’est comme chez votre thérapeute, à part qu’on donne ce qu’on veut, pas moins de 20 euros, bien entendu. Il pourrait éventuellement caculer la durée du traitement si vous lui montrez le chiffre de votre compte en banque.
La colonne suivante et toutes les autres ensuite, sont réservées à l’amour. Celui qui, de nos jours, se dit mal aimé, qu’il consulte Cindy, tél. 04/371.98.10. Elle paie en nature – oui, vous avez bien lu, c’est elle qui paie – la bricole que tu feras chez elle !... Elle vous le demande à deux genoux, venez, c’est elle qui régale, non, c’est le contraire, c’est vous qui régalez, mais c’est elle qui paie de sa riche nature !
Honteux de descendre dans un clandé à Liège ? Nadia et sa copine vous reçoivent à dix minutes du centre, dans un cadre agréable. Garanti désinhibition à 100 %. Elles se mettent à deux pour le prix d’une ! Jusqu’au 15 janvier et la fin des soldes.
Des masseuses beaucoup plus expertes qu’en physiothérapie à la Clinique de l’Espérance ? Il y en a trois pages. Vous pouvez même choisir sur catalogue. Allez un peu dire ça au guichet de l’Espérance : « J’peux voir le catalogue ? »
Vous avez Amandine qui vous reçoit en privé, dotée de sa forte poitrine, dans un cabinet de consultation tellement étroit qu’elle vous masse, le nichon pratiquement dans l’œil.
Ceux qui n’ont pas digéré le complexe d’Œdipe gay, peuvent retrouver leur père chez Axelle, travesti de 62 ans, exquise et féminine jusqu’à la pointe des moustaches. Erika une transexuelle vous fera voir qu’elle en a encore une belle paire avant disparition, entre 9 et 12 h à son home. Avec un peu d’argent pour payer son opération, elle ne demande qu’un peu de douceur. Greg, un jeune masseur de 23 ans, ne reçoit que les hommes sur rendez-vous, tandis que sa sœur, Maîtresse femme, vous appliquera une fessée avec un martinet spécial fête de nouvel an. Rien que du bonheur.

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Si vous aimez vous travestir en nourrisson ou en mickey, une charmante, ancienne habilleuse des théâtres parisiens, vous présente sa garde-robe et sa table à langer jusqu’à 120 kilos, talc à discrétion et gratuit.
Vous n’avez plus confiance en vous ? Vous n’aimez plus vous montrer ?
Qu’à cela ne tienne, Pénélope vous fera l’amour par téléphone à seulement 0,85 la minute.
Moyennant un forfait de 10 euros, elle s’engage à jouir de façon complète comme vous pourrez l’entendre par ses soupirs et hoquets..
Enfin, tout le matériel qui vous intéresse, préservatifs, tampons, gel intime, fuckmachine, brumisateur d’urine tropicale, chaînes tous calibres, vibromasseur sur secteur ou pile, poupée gonflable, trayeuse, kamasoutra et toute littérature technique en planches et illustrations, pénis postiches, godemichés toutes tailles, pinces, tisonniers et même tronçonneuses, vous seront livrés endéans les 24 heures et quasiment à prix coûtant en téléphonant chez « Solution et Equipement », zoning des Hauts-Sarts.
Et que je n’entende plus des gens se plaindre qu’ils ne sont pas aimés.

22 décembre 2004

Sarah

Elle fait du feu dans la cheminée du salon.
Il fait froid et elle a raison de faire du feu.
Je m’approche, non pas pour être près d’elle, mais parce qu’il fait froid et qu’elle a fait du feu.
Elle reste à contempler la flamme.
Immobile, l’œil fixé sur un tison, sa pensée est ailleurs. Sa pensée frissonne puisqu’elle est sur le chemin. A son passage, les arbres secouent leurs branches et du givre tombe et perce cette âme transparente.
Je la sens prête à courir le chemin.
Elle se lève pour rejoindre son âme.
- Où vas-tu ?
Je savais qu’il était trop tard. Ce n’était pas la peine de poser une question à des murs. C’était avant qu’il fallait la poser. Quand une réponse était encore possible.
Elle s’en va sans répondre.
Comme elle n’avait fait le feu que pour elle, les flammes la suivent en dansant.
Il ne reste que la boîte d’allumettes et des bûches à demi calcinées.
Avant-hier, c’était un autre qui était devant un corps déserté de l’âme, tandis qu’au bout du chemin je la sentais me caresser le visage.
Je vis ensuite son corps s’animer de cette âme à mes pas attachée.
Les choses ne se sont pas précipitées. Elles ont suivi leur cours.
C’est une femme qui a l’arithmétique en horreur.
Elle a cessé de compter à dix-sept ans, quand l’étudiant en médecine qui allait épouser celle que deux familles lui prédestinaient, épuisa les joies de la jeunesse dans ses bras de marbre blanc.
Non pas qu’elle fût sensible au carabin, elle ne l’avait jamais été que d’elle-même.
C’était là le secret qui ne la faisait pas vieillir.

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Puis vinrent les autres, dont je fus.
Aux premiers, elle ne leur prit que deux ans.
Qu’est-ce deux ans d’une longue vie ?
Les suivants se virent amputés de cinq belles années.
Les troisièmes, brusquement perdirent tant et tant de belles années que leurs tempes grisonnèrent au bout d’un trimestre.
Le groupe dont je fais partie est l’avant dernier. Je le sais. La nuit qui mit le brandon à l’aurore fut décisive. La seule journée de bonheur qui me fut accordée – quoique pleine et entière – me réduisit à l’état de vieillard.
Je me traîne jusqu’à la fenêtre
Il neige. Noël aura ce manteau d’innocence que jettent les passants sur les épaules du vice ;
L’allée du jardin est large comme une avenue.
L’autre attend impassible à l’autre bout.
Au fur et à mesure qu’elle avance, le visage de l’homme s’altère.
Sa main prête à saisir le corps qui vient à lui se décharne et tremble. On dirait que les secondes valent des années.
Plus elle presse le pas, plus elle s’impatiente, plus l’autre se tasse et fond comme neige au printemps.
Elle le touche presque, qu’il s’écroule agonisant.
Elle se penche sur lui et fait les gestes de l’amour, en vain.
Le cadavre est pauvre chose chétive. Sur le sexe dressé, les premiers flocons de neige se sont éparpillés en gouttelettes fines. Puis, tout se recouvre lentement du manteau de l’oubli.
Elle le secoue et tente en vain de ranimer une ultime flamme.
Elle se retourne et nos regards se croisent.
La noirceur de l’âme est inscrite dans la beauté du visage.
Ce qu’on lit dans ses yeux suffit à deviner le crime de ce corps tourmenté.
Elle rentre au salon, comme si nous ne nous étions jamais quittés.
Elle reprend la conversation de la veille, de la même manière, comme si l’autre enseveli sous la neige, n’avait été qu’une abstraction.
Un sourire se devine sur ses lèvres mi-closes au souvenir exalté des nuits de débauche.
C’est une femme pratique qui n’entend exploiter que de ce dont elle sait disposer.
Le feu est reparti et la flamme avec elle s’élance dans des danses lascives.
L’amant du jardin a déteint sur sa robe de lune. Des cristaux de neige font encore briller le sang en cascades de petits rubis.
Se dévêtir de la clarté lunaire pour le safran des flammes l’immobilise devant moi.
Tournant enfin son visage marmoréen, elle s’aperçoit que j’expire.
Son visage de dix-sept ans se déprend de ce corps. Son âme le remplace.
La boucle est bouclée.
Ensemble nous rejoindrons le royaume des ombres.
Quand la vie fait défaut, certaines créatures s’unissent parfois dans la mort, comme s’accouplent les cadavres disloqués, jetés sans soin dans la fosse commune, par un Charon pressé.

Toi qui comme un coup de couteau
Dans mon cœur plaintif es entrée
Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée…

21 décembre 2004

Nomisma et Nomos (Argent et Loi)

Il n’y a pas pire tentation que celle de l’argent.
Et c’est au bas de l’échelle sociale que cette tentation est la plus prégnante.
Pourquoi la gauche y est-elle plus sensible que la droite ?
Parce que certains dirigeants issus de milieux modestes, convaincus au départ de lutter honnêtement et de bonne foi pour l’émancipation des petites gens, s’aperçoivent que leur motivation était beaucoup moins altruiste devant le tiroir-caisse. Ils se découvrent avec les goûts de luxe, un appétit bourgeois qu’ils ignoraient.
Les histoires de syndicalistes qui craquent et brusquement puisent dans la caisse « sacrée » des travailleurs, sont suffisamment fréquentes pour que chacun d’entre nous se souvienne de l’un ou l’autre fait « regrettable ».
Dans les Services publics, le défit n’est pas moindre.
En politique, la lutte pour la direction des affaires ne vient pas tant de la volonté d’œuvrer pour une société plus juste, que d’une ambition personnelle.
C’est facile pour les riches de mettre le doigt sur les malhonnêtetés des gens du peuple, eux qui n’ont jamais fait que cela, sinon pire, sans oublier leurs ancêtres qui ont souvent démarré sur « un coup » dont on parle encore des générations plus tard, soit avec gêne, soit avec admiration. Combien de vieilles crapules ont « sacrifié » leur « honneur » pour mettre à l’abri du besoin les générations suivantes ?
Avec l’évolution des mœurs - cette frilosité qui s’est emparée du monde moderne qui restreint les libertés au nom de la liberté, au point que l’on se demande si nous ne finirons pas par une schizophrénie collective – il n’y a plus guère que les friponneries légalisées du commerce et des affaires qui soient permises. Là, le gredin y est honoré comme bon commerçant. Le père de famille transmet à ses descendants ses courtages, ses actions et ses royalties non pas comme autant de hold-up, mais comme le fruit de son travail.

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Enfin, une bourgeoisie d’Administration a vu le jour depuis la fin de la dernière guerre. Elle prend le relais de la bourgeoisie du petit commerce qui tend à rejoindre le prolétariat. Cette bourgeoisie d’Administration ne fait rien d’autre que gérer l’Etat en prélevant un coquet pourcentage au passage. C’est une bourgeoisie d’un caractère spécial puisque l’argent qui y circule n’est le fruit d’aucun travail créatif ou productif. C’est un argent « facile », c’est-à-dire une sorte de rente, un viager venu du fonds collectif dont l’origine s’est diluée dans l’abstrait et qui ne touche pas au sens moral. (Voler l’Etat, c’est ne voler personne.)
On y a le sentiment d’accomplir un travail plus ou moins bien rémunéré selon les grades et les niveaux, avec ceci de particulier que ce n’est pas l’employeur – c’est-à-dire le peuple – qui fixe le juste pris de ce travail, mais les plus hauts placés de cette Administration, c’est-à-dire les Parlementaires. Ce qui, évidemment, est une façon désinvolte de nous dire d’aller nous faire foutre.

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Le travailleur honnête, lui, n’a rien à transmettre que sa peine, sa misère et le sentiment confus d’avoir été baisé par le fait d’appartenir à une classe, dont on dit qu’elle n’existe plus afin d’éviter d’en parler. Etonnons-nous que certains se rebellent !
Restent deux voies possibles.
La, plus classique consiste à faire le plus d’études que l’on peut et, bourré de diplômes, prétendre passer des deuxièmes classes en première. En général ceux qui y parviennent ont horreur qu’on leur rappelle le pain dur et le grand-père illettré. Sauf, si leur réussite est éclatante. Ils font alors un triomphe pour eux-mêmes de la modestie de leur départ. Les gens en place aiment les contes de fée. Cela leur rappelle le leur. Le merveilleux apaise les foules et leur donne l’illusion que leur tour viendra et qu’au moins leurs filles chausseront la pantoufle de vair. Ils ignorent superbement qu’il n’y a qu’une princesse Mathilde par génération.
C’est le cas de Marie Arena.
L’autre voie, plus réaliste, consiste à vivre sa vie sans illusion sur soi-même et les autres et n’accorder aucun crédit à ce qui est publiquement révéré, en se disant qu’au petit jeu des contraires, on est toujours l’imbécile de quelqu’un. C’est une voie difficile, mais qui procure des satisfactions ne serait-ce que celle de ne pas se fier aux apparences, aux lieux communs et à la pensée majoritaire, de faire la part des choses, des paillettes et des strass, des courants et des bonimenteurs d’estrade.
C’est la voie du sage et du philosophe.
Peut-être y aurait-il une troisième voie qui consiste à balayer le monde d’un revers de main, afin d’en mettre sur pied un autre que l’on veut évidemment adapter à soi. On ne peut raisonnablement chasser les gens en place que par le meurtre et l’émeute. Ce qui est la contradiction majeure, car on ne peut annuler la violence des puissants qui nous exploitent et nous écrasent par une violence qui serait sacrée, parce qu’aucune violence n’est bénigne. Ce ne serait qu’une juxtaposition de violences donc cela conduirait à un monde pire encore que celui que nous condamnerions.
On en est là.

20 décembre 2004

Un lynchage médiatique

Il n’a guère fallu de temps dans la jeune carrière de Marie Arena pour qu’elle tombe dans le travers des vieux briscards de la politique : népotisme, dépenses somptuaires, justifications dilatoires. Pour atteindre à la perfection, il ne lui reste qu’à imiter Philippe Moureaux dans l’art d’interrompre les autres et de les accuser de poujadisme.
Si la ministre-présidente passe le cap et qu’elle réussit à transformer les casseroles qu’elle traîne en modestes pintes en fer blanc, on peut lui prédire une brillante réussite.
Ce n’est pas dans la poche.
Les gens sont bizarres, influencés par la dernière Heure, les voilà remontés contre la ministre pour des choses qui se passent partout et dans tous les ministères, sans qu’apparemment personne ne s’en émeuve.
Qu’on dénonce au cabinet de la ministre sa gestion de la rénovation du bâtiment de la Communauté, place Surlet de Chockier, à Bruxelles, cela part d’une bonne défense de la démocratie, mais oublier que de pareilles « erreurs » se font ailleurs et presque chez tous nos ministres, cela prend la forme d’une chasse au sorcière.
Et là, je ne suis pas d’accord.

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L’histoire de son architecte omniprésent, qui « triomphe » magistralement de ses concurrents, enlève des commandes non seulement à la Communauté, mais aussi dans les demeures particulières de la ministre, de Forest à Binche, l’engagement du fils du dit, hyper compétent- évidemment - fait penser à cette affaire d’Edith Cresson, commissaire européenne, qui contribua à la démission de Jacques Santer.
La relecture de l’affaire Cresson vaut la peine. La voici en quelques mots :
« Quand Madame Cresson arrive officiellement à Bruxelles en janvier 1995 pour prendre ses fonctions de commissaire, elle emmène avec elle son "ami de trente ans", René Berthelot, ancien dentiste de la bonne ville de Châtellerault, le fief de la brave Edith, dont elle était maire jusqu’en 1997. Berthelot, peu aimé par le reste de l’entourage pour le rôle qu’il joue dans la mouvance Cresson, a besoin de "gagner" sa vie à Bruxelles. Car Cresson ne veut à aucun prix se priver de sa compagnie. Berthelot est défini par des proches de la commissaire comme son "gourou". Il lui prédit l’avenir, la voyait déjà dans le temps accéder aux fonctions de président de la République, bref, il la conseille dans un domaine beaucoup moins scientifique que le secteur de la recherche que le commissaire français est appelé à diriger et au sein duquel Berthelot sera censé travailler plus tard. Cresson se procure un appartement à Bruxelles et y loge également Berthelot. C’est du provisoire, mais au début, on s’organise comme on peut. »
Que Madame Arena ne s’effraie pas. Madame Cresson a été relaxée des poursuites intentées contre elle. Parce que le pouvoir discrétionnaire laissé aux puissants de ce monde n’est pas réglementé et dès lors, ne constitue pas un délit. Les mœurs de nos élites n’ont guère évolué depuis l’Ancien Régime, comme on peut voir.
N’est-ce pas notre faute aussi de n’avoir jamais rien voulu savoir de la popotte de nos phénix ? C’est plus commode de faire confiance sans rien vérifier, n’est-ce pas.
Mais cette manie qu’ont les puissants de traîner derrière eux leurs « Ménines » est fort répandue et n’est condamnable que sous le seul aspect éthique.
Evidemment se fendre d’un discours sur l’austérité nécessaire du chômeur, après ce que l’on sait, deviendra pour « La Mostra » un exercice difficile.
La lamentable prestation d’un Di Rupo, moins fringant que d’habitude à l’émission Mise au point de ce dimanche 19 décembre, montre à suffisance comme il est dur de ramer pour les autres quand la malchance l’embarque dans une galère à laquelle il ne s’attendait pas.
Les libéraux rêvaient que les socialistes aient leur Ducarme. C’est fait !
A la maladresse de la dame aux yeux de braise, se joint la maladresse de son président de parti ; car enfin, les fils de… sont très répandus en politique, sont-ils aux postes qu’ils occupent par la seule vertu de leur mérite ? Certes, non. Cela est bien connu. Que les lignées soient ou non directes, les cousinages, les amants de sous le boisseau, les oncles par alliance ou même, comme l’a fait astucieusement remarquer Elio Di Rupo, les prétendues belles-sœurs, n’avaient jamais jusque là dérangé le tiers payant.
Pour le coup, il n’a pas tort, le successeur de Vandervelde et de Destrée.
Et les cabinets politisés ? Mais, c’est vieux comme la IIIme Internationale !
Nos ministères sont truffés d’espions au service des partis traditionnels. En principe, ils sont là pour faire avancer le schmilblick, en réalité pour tenir le ministre à l’œil, tous hauts fonctionnaires, nourris dans le sérail, beaux diplômes, grosses galettes et grandes fringales de mordre dans les budgets. Alors pourquoi pas un fils d’architecte favori chargé d’établir la liaison avec l’archiscénographe qui – de façon fortuite – se trouve être également le père du prodige, afin de renseigner celui-là des différentes fissures ou anomalies rencontrées dans le merveilleux édifices de la Communauté ! Parler en plus trois ou quatre langues n’est pas incompatible !
Bref, mercredi prochain, quand la sémillante ministre reviendra plancher à nouveau au Parlement wallon, que les députés décident que les 10 % rognés aux fastes et aux frasques gouvernementales aillent directement grossir les indemnités et les pensions des plus démunis, personne, pour une fois, n’y trouvera à redire et la messe sera dite.

19 décembre 2004

Un Noël qui se la pète.

- Combien de fois aurais-je encore à me répéter avant d’inscrire le mot fin ?
Le cycle est accompli et c’est comme si nous nous retrouvions au point de départ pour les mêmes souhaits et pour le même spectacle des foules que l’on photographie toujours en liesse à débiter les paroles de circonstance : « Joyeux Noël, Bonne année » etc.
Qu’est-ce qui a changé ? Apparemment pas grand-chose, sinon l’érosion des sols, un peu plus de pollution et le vieillissement que l’on sent monter en soi et que rien ne saurait arrêter.
Les réjouissances telles que nous les pratiquons valent à peine mieux que les jeux du cirque. Penser que ceux qui ne pourront satisfaire leur soif de plaisir vont rester chez eux à se morfondre devant les banalités télévisuelles, et que ceux qui ont réservé leur place à la montre des « talents » des autres s’efforceront de dissimuler sous des sourires d’apparent contentement l’irrépressible ennui des fins de nuit, ne m’apportent aucunement la satisfaction d’être quelqu’un de l’en-dehors, car mon contentement ne tire son sel que de ce que je fais d’habitude.
Bien sûr que nous les aimons les proches, les parents, ceux qui procèdent de nous et ceux dont nous procédons. Pourquoi diable ! faut-il le leur dire juste au coup de sifflet qui correspond au douzième de l’horloge ? Ne serait-ce pas plus simple de le leur prouver quand ils ont besoin de nous ou lorsqu’ils sentent que nous avons besoin d’eux ?

-Ça t’arrive de parler comme tout le monde ? T’as pas bientôt fini de faire du Proust comme on respire ? C’est quoi ça, une idée qui s’emboîte dans une autre, parce qu’ensemble elles serviront à une troisième dont on n’est pas sûr qu’elle sera la dernière ? Hein !… je tombe dans ton truc ! Rien que pour expliquer qu’il est con, je deviens con moi-même… T’es pas bien sur cette bon dieu de putain de planète ? Qu’est-ce que ça te fait qu’on soit pas tous à picoler et bouffer des petits fours ? A partir du fait que t’as accès au buffet, qu’est-ce qui te tourmente ? C’est pas toi qui peux changer le monde. Alors, si t’y peux rien, qu’est-ce qui t’empêche de rigoler quand t’en as l’occasion ? C’est pas beau une meuf qu’a envie de toi, quand t’as envie d’elle ? Du vin quand t’as soif… un bon match de foot…

Sénèque (lettre LXXX) – Et voici qu’une énorme clameur monte du stade. Si elle ne me fait pas perdre le fil de ma pensée, elle en modifie cependant le contenu. Elle m’invite à méditer sur la situation même où nous nous trouvons. Je me dis : nombreux, ceux qui exercent leur corps, bien rares ceux qui exercent leur esprit ! Quelle affluence pour un spectacle éphémère et dérisoire ! Quelle solitude autour des études enrichissantes ! Comme ils sont faibles d’esprit les êtres dont les biceps et les épaules provoquent l’admiration !

- T’entends ces types, Cri-d’Amour ? Comme si avoir une belle gueule, des biceps et du répondant sous la ceinture ne signifiaient rien ! Mais, ça signifie tout, mon pote ! T’as quitté Ernest pourquoi, mon Cri ? Parce qu’au mieux il bandait tous les trimestres, et encore, quand il sortait de sa bibliothèque, de ses grimoires, de ses thèses sur la jeunesse de quelque mirobolant foutu personnage et fallait-il encore que monsieur ait l’inspiration. Moi, j’ai quitté Cléophaste, pas parce qu’il avait un nom à coucher dehors, mais parce qu’il couchait plus. Epoque matérialiste, tant que tu veux. L’oseille et le cul, les maîtres du monde, je veux bien. Le problème universel, c’est de savoir dans quel ordre tu les places ?

- Roland Dubillard – Il tient à sa rigueur parce qu’il aime la veulerie chez les autres, parce que plus il sera franc, plus il pourra souffrir du mensonge. Il a choisi Célimène pour souffrir d’elle ; il l’a peinte en noir et lui-même en blanc parce qu’il cherchait le malheur, parce qu’il cherchait sur la terre le seul endroit vraiment écarté, non par le désert mais la tombe, non pas l’honneur, mais la mort. Comment rire d’un homme qui ne veut pas vivre ? Quant à cette pauvre Célimène, elle est innocente comme un couteau.

- Evidemment, si on se lance dans la citation ! Le principe en est simple. On va d’abord à la signature et si c’est Sartre, Gide ou Valéry, il a toujours raison. Même si c’est Dubillard !...
Mon ex m’en citait toujours l’une ou l’autre, histoire de me faire comprendre que les femmes ne l’intéressaient plus que mortes.

- Et alors ?

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-Je l’ai trompé partout où j’ai pu. En vacances avec des garçons de restaurant, chez nous au Thier-à-Liège avec un consommateur de l’Eldorado, le café dancing, un poivrot de l’Académie, même un eunuque sur un trajet dans les gorges du Verdon !

-Il ne s’est jamais douté de rien ?

- Si, il a remarqué que lorsque je prétendais me rendre chez mon amie, le compteur de la voiture marquait toujours 3 km 700.

- Ce qui veut dire ?

-…que puisque Georgine créchait à 6 km, ça ne pouvait pas être chez elle que je me rendais.

- Bien raisonné.

- C’est que, les intellos… s’ils sont cons, ils sont pas bièsses.

- Je ne comprends plus rien.

-Laisse tomber, c’est pas grave. Et Joyeux Noël.

18 décembre 2004

Quelle galère !

La décision du Parlement européen d’entreprendre des négociations avec la Turquie pour son entrée dans l’UE pose à certains pays dont la France et la Belgique un problème éthique.
Il s’agit de définir dans quelle condition un porte-parole de la Nation peut prendre une position engageant celle-ci avant une quelconque forme de décision collective et démocratique.
En Belgique, on a vu le premier ministre Verhofstadt accueillir le premier ministre turc en se jetant littéralement dans ses bras.
En France, le président Chirac est allé d’un discours, véritable plaidoyer en faveur d’Ankara, malgré une opinion française assez incertaine, voire hostile et d’un UMP, plus favorable à une association qu’une entrée de la Turquie à l’UE.
Le problème ne porte pas sur la décision en elle-même, mais sur la manière dont elle a été souhaitée par nos dirigeants, sans aucun plébiscite, ni même aucun accord formel entre les partis. Personne n’a fixé une règle de conduite sur cette matière si délicate.
Les manifestations intempestives de nos dirigeants en faveur de la Turquie constitueraient-elles un abus de pouvoir ?
Si, évidemment, c’est ainsi qu’en Belgique, on entend exercer la démocratie, on peut s’attendre à tout, déjà à ce que nous nous habituons à ce que le pouvoir économique nous dicte notre manière de consommer, voilà que s’adjoint à cette pratique notre manière de penser !
On s’en rend compte tous les jours, des socialistes aux libéraux, beaucoup pensent qu’il y a des limites à l’extension de la démocratie politique. Ils sont persuadés que la volonté populaire est plus souvent une menace, qu’une volonté exprimée majoritairement donnant l’image claire d’une ligne de conduite.

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A les entendre, l’excès de démocratie tuerait la démocratie.
Cette conception se traduirait – se traduit peut-être déjà ? – par une évolution du régime démocratique, vers un fascisme bénin dont certains ministres semblent, malgré eux, avoir montré l’exemple, ces temps-ci.
Quand on est censé représenter le peuple, on a la décence de taire en attendant l’avis général ses sentiments particuliers. Ou alors, pour défendre ses convictions personnelles dans une matière qui ne touche pas au mandat que l’on exerce, il faut descendre de son piédestal et remiser le porte-voix de la fonction, afin de rentrer dans la peau d’un citoyen ordinaire.
Mais à force d’interpréter la pensée des autres, ces gens ont-ils encore la faculté de redevenir des citoyens ordinaires ?
On peut dire ce que l’on veut de la décision du Roi Baudouin de se mettre en congé pour ne pas signer la loi sur l’avortement, mais son geste avait le mérite de la clarté.
C’est quoi, pour nos gens de pouvoir, la démocratie en définitive ?
La question reste à poser.
S’il y a matière à débat sur l’adhésion de la Turquie, comme sur l’adoption de la Constitution européenne d’ailleurs, on peut s’étonner que des personnages de premier plan profitent de leur notoriété pour influencer l’opinion.
Une telle désinvolture, un tel mépris de ce que peuvent penser les électeurs, montre à quel point nous aurions raison de suspecter le pouvoir exécutif dans toutes les spéculations mettant en cause notre avenir.
Si nous nous laissions aller à leur faire confiance, nous nous trouverions un jour ou l’autre dans une Belgique où nous ne nous reconnaîtrions plus.

17 décembre 2004

Pour nos vieux, laissez les emballages !

On se demande où Mister Daerden va chercher le flouze pour entretenir nos entretenues ?
C’est facile évidemment de rattraper le coup comme la dame aux oranges du CDH et le compère Di Rupo, après le mini scandale des largesses mobilières et ravaleuses, de froncer des sourcils et jurer de serrer la vis au plus près, juste le temps nécessaire pour que le public ait tout oublié.
Avant cela, c’était table ouverte et champagne pour tout le monde.
Il a bien fallu qu’on les sorte de quelque part, ces malheureux 300.000 euros !
Le lendemain de la mère des discours, du gros camion de livraison, les meubles de l’Arena show atterrissaient sur le trottoir de notre fleuron patrimonial. Devant les médisants de la presse, il y eut une valse hésitation.
Un grand conciliabule se fit à l’intérieur du ministère. Le camion accomplit le tour du pâté de maison, histoire de semer le doute et la presse. En vain ! On n’allait pas tout de même laisser le bureau à 4.000 euros passer la nuit dans la rue, même super bien emballé !
Il fallut poursuivre l’opération.

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Merde ! la ministre s’était trompée de jour.
C’est mardi qu’elle nous est apparue moulée dans son bleu de chauffe, pour le discours des chiffres et des lettres à l’attention du parlement wallon ; alors que dans la même tenue le lendemain, elle aurait pu prendre sa part du boulot en aidant les déménageurs en toute fraternité socialiste !
Comme un contrôleur aérien qui crierait casse-cou au vu d’un trafic intense, le public craint trop de mouvements dans les attributions des portefeuilles gouvernementaux. Si Arena ressemblait à Onkelinx qui a fait presque tous les ministères, les tapissiers-garnisseurs et les vendeurs en bureautique feraient fortune, mais nous, nous serions sur le cul.
Heureusement que Daerden a des réserves, ne serait-ce que grâce à la parcimonie dont font preuve les humanistes au pouvoir vis-à-vis des allocataires sociaux et des pensionnés.
Les personnes âgées belges bénéficient d’un revenu minimum garanti plutôt faible, avec 753 euros, par rapport à la France, 1.281 euros.
Ainsi les discours avant les élections faisant état de l‘augmentation des allocations n’étaient en réalité là que pour masquer la fuite de 528 euros par mois que ces altruistes ne distribuent pas à nos plus démunis compatriotes pour qu’ils soient au même niveau que leurs homologues français.
Autrement dit on retient un bureau type Arena sur chaque petite pension tous les 7 mois et 5 jours !
En voilà du beau meuble !
Si encore on laissait l’emballage de ce ces précieuses garnitures des vanités montoises à la disposition des pauvres gens, les planches, les plastics lourds et souples pourraient au moins servir à ceux qui ont froid. C’est quand même un peu à eux, non ?
Hélas ! aux dernières nouvelles, les déménageurs ont repris jusqu’aux ficelles des emballages !
Ce n’est vraiment pas chic !

16 décembre 2004

A se fendre la gueule…

Oh ! comme ils sont drôles… au premier mot le public éclate. Le Type aux « applause » n’a pas besoin de donner le signal, que ce soit chez Arthur, Fogiel ou Ardisson, l’acteur comique qui vend son actualité pour peu qu’il se trémousse, ergote, se lève, prend le monde à témoin et interrompt le présentateur, est certain de son effet.
Vous diriez pareil pour faire rigoler les mêmes ploucs, il y aurait comme un silence réprobateur. Le « Ce qu’il est con, celui-là !» n’aurait pas la même résonance dans la bouche des préposés aux rires que si cela avait été Debbouz ou Smaïn à débiter les mêmes conneries.
Miracle du comique ? Magie de l’acteur ?
Pourtant Poelvoort fait du Poelvoort et Bigard du Bigard.
Mieux, Bigard n’a de l’esprit que parce qu’il a de la mémoire. Ardisson le relance sur un de ses sketchs et le voilà parti pour cinq minutes de rire garanti. Pour le reste, il n’est pas drôle. Il prend des positions réacs à la limite ….
Poelvoort se cantonne dans l’esprit de son film les « Randonneurs ». Mais lui, en principe, n’a pas pour profession de faire de la variété, c’est un acteur.
Depuis Blanche et Desproges, l’interview de vedette a beaucoup évolué.
Ce n’est plus au présentateur de faire le spectacle, mais aux invités. Si bien que ceux qui l’ont compris ne redescendent pratiquement jamais de la scène de l’Olympia ou du Stade de France. Ils sont toujours en représentation. Bigard n’est plus le même homme depuis qu’il a réuni un paquet de monde à son show. Il y a des rôles qui marquent comme le Napoléon par Clavier. Bigard naviguait sur le podium du Stade, comme Bonaparte à Austerlitz.
Une brève de comptoir racontée à un stade complet, n’a pas l’humour modeste.
Qu’ils s’étonnent après cela qu’on les pourchasse dans la rue pour faire rire et rire encore. Profession : comique, ce n’est pas amusant tous les jours.
La réputation de faire rire est pourtant d’une grande fragilité.
On se souvient de Dieudonné. D’abord irrésistible, avec des riens, il passait pour faire de l’humour. Voilà qu’il déplaît à la suite d’une imitation de rabbin. Torpillé par les médias tous plus ou moins consensuels pour le coup, lâché par son ancien équipier Elie Semoun, le voilà cuit. On ne l’invite plus. Il ne fait plus rire. Pourtant, c’est toujours le même panaché d’une mère bretonne et d’un père africain qui affronte le public, ni plus ni moins que les autres saltimbanques. Ces sketches n’ont pas trop vieillis. Il en a écrit d’autres, ni meilleurs, ni moins bons. Il n’a plus d’ « applause », plus de place sur les plateaux. Il vient d’être relaxé par le tribunal d’une accusation d’antisémitisme. Présumé innocent, il en sort décidément coupable L’opinion, c’est un torpilleur qui ne fait jamais machine arrière. Si Dieudonné s’en remet, il faudra du temps. A moins qu’il ne frappe un grand coup, qu’il se convertisse au judaïsme ou qu’il épouse la charmante Elsa Zylberstein, ce qui en soi n’est pas une si mauvaise fin.
C’est donc autant les médias que le public qui font le comique.

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C’est pour cela que l’homme de la rue ne fait pas rire : il n’est pas connu. Il ne le deviendrait partiellement que s’il imitait un comique, indirect propriétaire de la notoriété qu’il singe.
La tentation est forte d’en faire davantage pour faire rire encore plus. C’est ainsi que sans le savoir, certains deviennent insupportables comme Debbouz qui ne rattrape le coup que parce que le public lui est acquis d’avance.
Les invités du plateau deviennent le miroir des anonymes. Les cabots s’y complaisent au fur et à mesure qu’ils perçoivent que les gens adhèrent à ce qu’ils disent.
On rit des maladroits, des cocus, des malchanceux, des pas gâtés de la vie, de certaines petites infirmités avec défense de toucher aux grosses. C’est-à-dire de nous-mêmes qui avons été tout cela ou qui pourrions l’être. La scatologie a son petit succès. La pornographie est d’un maniement plus délicat, à moins d’en ajouter comme Bigard, toujours en plein sexisme, si empli de l’image du gros beauf qu’on se demande s’il n’en est pas un. On rit des échecs, des défauts – Timsit a ramé pour revenir au top après s’être moqué des trisomiques. O rit de tous les besoins. La société bourgeoise rabaisse l’homme et c’est tout profit pour le rire. Le rire n’est impitoyable que pour ceux qui sont vulnérables et souvent dans l’impossibilité de se défendre, à la télévision, comme dans tout ce qui touche au domaine public. Mais, ce faisant, le comique prend bien soin de laisser entendre que le cocu c’est lui, l’avare, c’est lui et le scatologue, c’est encore lui, tout en étant qu’il pourrait être quelqu’un d’autre dans la salle ;
Le rire est collectif par essence.
L’emploi de comique est ambigu. Le public déréalise l’interprète des textes soumis aux rires. Il sera impossible bientôt à Debbouz de s’identifier à autre chose qu’un amuseur, même s’il dit par ailleurs des choses graves sur la Palestine, par exemple, mais vite gâtées par une pitrerie ou par une complaisance envers le Maroc dont il est originaire, oubliant alors que le régime de ce pays est loin d’être démocratique.
N‘empêche qu’en l’état, nous avons besoin d’eux, d’autant que ça et là, nous parvient une plaisanterie qui sans avoir l’air d’y toucher met le doigt sur une plaie dont personne ne parle. Ne serait-ce que pour cela…

15 décembre 2004

Après les larmes de Marie Arena, l’addition

Au risque de répéter ce que j’ai écrit dimanche, les chiffres dont la ministre a parsemé son discours justificatif de ce mardi n’ont jamais été matière à controverse. Elle-même n’est en cause que sur l’opportunité de s’engager dans des dépenses de prestige au vu de l’état de pauvreté de la Wallonie. Mais, elle n’est pas la seule dans la frénésie dilapidatrice. Si on parlait aussi de notre grand argentier, le ministre Daerden ?
J’avais espéré que les socialistes seraient davantage conscients de la réalité sociale et qu’ils y regarderaient à deux fois avant de se lancer dans des programmes de rénovation des salons dorés de la Wallonie à talons rouges. Je me suis trompé.
Ces gens, ni plus ni moins que les libéraux, font partie d’un establishment qui par sa propre mondanité s’est définitivement coupé des origines.
Les arguments de Di Rupo parti au secours lundi de son petit phénomène montois ne sont que des amabilités « entre pays ». Comment qualifier autrement le malaise de la ministre à son retour d’Afrique monté en tête d’épingle par son chef de parti ? Bon. Elle a eu la tourista, et alors ? Elle n’est pas la première. Voilà l’effet que produisent des feuilles de laitue à tous les repas.
A certains petits détails, Marie devrait se poser la question de savoir si elle a vraiment choisi le parti qui convient à sa nature délicate et brillante, celle d’une personne qui aspire à vivre dans les salons, à se pencher en robe du soir sur un Steinway, alors qu’un lauréat d’un Elisabeth bonne cuvée joue une page de Rachmaninov ?
Lorsqu’elle nous sort, lors d’un de ses aménagements antérieurs, que le bureau de son prédécesseur sentait le cigare, pour tout faire arracher et changer de neuf, on se demande si elle a jamais senti le marcel d’un ouvrier métallurgiste, profession exercée par son père a-t-elle dit, après une journée devant le four ?
Est-ce qu’on milite dans un parti comme le sien pour transformer la société ou pour accéder à la nomenklatura et aux privilèges de classe ?

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Elle ne devrait pas être la seule à se poser la question.
Du temps d’André Renard et de Dehousse (père) les socialistes même s’ils n’étaient plus tout à fait sincères avaient la décence de mettre sous le boisseau ce que leurs compères actuels exposent et que le fisc appelle les signes extérieurs de richesse.
Aujourd’hui cela crève les yeux, c’est un nouvel étendard qui remplace la loque rouge que leurs grands parents agitaient devant les grilles des charbonnages. Quel étendard ? Mais celui des marques. En zoomant sur les vêtures, on se croirait à un défilé place Vendôme chez Chaumet ou rue de la Paix chez Lagerfeld. On aime que nos ministres présentent bien, c’est certain. On ne voit pas la dame Arena déguisée en Bécassine. On réserve cette démagogie-là aux écolos. Quoique, en un sens, c’est quand même plus sympa. J’avais frémi de bonheur en voyant Evelyne Huytebroeck en trottinette électrique.
Quant à puer la jet-set, c’est se foutre de la gueule de ceux qui s’habillent chez Terre.
Cela ne serait rien, si cette fatuité ne se bornait qu’à leur mise. Mais non. Il faut encore que l’environnement soit en rapport. Et là, ça ne va plus, tant il y a des choses à faire partout en Wallonie et de plus urgent que changer un bureau parce qu’il sent le cigare.
On ne les veut pas en loques dans des soupentes à recevoir des délégations étrangères. Mais, on ne les veut pas non plus dans du luxe tapageur à se moquer du monde en réclamant l’austérité pour les autres.
Il n’y a pas pire que le mauvais exemple qu’ils donnent assorti d’un discours hypocrite.

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Et je retiendrai la remarque d’Elio Di Rupo au sujet de la frugalité du repas principalement fait de sandwiches au jambon qu’il a offert à la presse ce lundi, pour faire remarquer que la démagogie de sa réflexion au moment où un des cracks de son écurie vient de se faire payer un bureau à 4.000 euros, a quelque chose de maladroit et de déplacé.
Allez, avouez, Mesdames et Messieurs de la politique, avouez donc qu’avoir le cul dans le beurre amollit les consciences et détruit le sens du devoir.

14 décembre 2004

Tableaux en successions rapides

Je me suis éveillé ce matin avec une grande satisfaction personnelle.
Elle tenait à presque rien : celle de pouvoir me rendormir.

« Le plein jour laisse filtrer un rayon de soleil à travers les tentures. Quelques secondes, je m’émerveille de l’ombre dorée au plafond.
A la patinoire de Coronmeuse avec Gisèle, nous patinons en couple et les gens s’arrêtent pour nous regarder. Elle a des charlottes et un visage d’ange. Des quelques monnaies soustraites du tiroir-caisse de la boulangerie paternelle, elle achète deux cornets de crème glacée.
J’hésite entre me rendormir ou sauter du lit. Je choisis l’option médiane. Je reste dans une semi inconscience.
Pour conforter ma quiétude, je tâte à côté de moi. Seul !... Célestine a décidé de dormir ailleurs. Son manque d’enthousiasme des dernières semaines avait éveillé mes soupçons. Nous avions décidé de rompre.
Quelques linges arachnéens dans les tiroirs me la rappellent, avec ses toiles où elle aime se peindre éternellement jeune. C’est de la fiction.

Sous les draps la déesse se mit à ronfler
Sa bouche exhala une fragrance d’eau morte
Et le soupir attendu des lèvres accortes
Ne fut qu’un vent coulis de l’intestin enflé…
(J’ai vaguement conscience que je pète à sa place.)

Je me flatte que la main qui me parcourt est celle d’une passante qui glissait la veille entre les rayons de livres à la FNAC. J’aime les livres. J’ai toujours l’espoir de croiser une lectrice de Flaubert ou, mieux, de Saint-Simon. Quoique chiante, une admiratrice d’Amélie Nothomb ferait l’affaire, au pire, une consommatrice de JK Rowling, mais, ce cas extrême réduirait à néant mes moyens de séduction.
A une distance évaluée à trois fortes anthologies, une charmante emmitouflée dans une écharpe rouge feuillette une nouveauté. Serait-elle auteure ?
« Wolfgang Amadeus tant haï de Muguette
Lui commande le soir à la chambrette
De garder sa petite culotte de nuit… »
Elle a le visage chiffonné d’une femme veillant tard une relecture de « La Chartreuse de Parme ». Tendre victime d’un conflit au long mûrissement, une inavouable raison l’empêche cinq ans après la séparation, de faire l’amour avec un autre.
Je ne déchiffre qu’à la caisse l’ouvrage qu’elle emporte : « Anna Karenine ». Vu son âge, c’est décevant. Elle aurait dû lire cela à l’adolescence.
Cela me contrarie.

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J’entre dans l’incompréhension de l’être.
L’auteur russe me précipite à la révolution d’Octobre. Tout cela n’a aucun rapport.
La dame à l’écharpe disparaît avec son livre.
Je poursuis mes divagations.
Comment puis-je avoir des jugements sur tout ? Le parti socialiste est une de mes cibles favorites. Qu’est-ce qu’il m’a fait ?
Je suis près d’envoyer une lettre d’excuse à la section liégeoise du parti et à un ami qui, il y a peu, s’en était réclamé dans une crise de mysticisme laïque...
Un amour-propre surdimensionné me retient. J’ai déjà pourtant écrit soixante pages.
Quelque part le sort de Kerry s’est scellé. Dans quatre ans, ce sera à Hillary de tenter sa chance.
Ceux qui s’imaginaient que Bush vainqueur patinerait en couple avec l’Europe comme moi avec Gisèle, se trompent. Condoleezza Rice monte en puissance… Il y a ainsi des femmes qui n’ont pas de corps tant on ne voit que la fermeté et l’ambition sur leur visage.
Comment traduire le glissando de la pensée en mots et en phrases, sans perdre le fil ?
Célestine empaquette ses affaires, elle avait à choisir entre un historien de brasserie de la guerre 14-18 et un vieil Italien vétéran du Football club de Seraing. C’est le footballeur retraité qui emporte les enchères, ou « en chair » puisqu’il s’agit de la sémillante.
L’étoffe que je croyais être le drap de lit froissé dans mon rêve n’est rien que le maillot numéro onze du club qu’elle tenait entre ses jambes pour s’endormir. Est-ce le suint du joueur ou celui sui generis de Célestine ? Trouble de l’âme : je bande !... (facile, on est le matin)
L’inconnue de la FNAC réapparaît avec « Les mémoire d’un Ane » pour sa petite Alice.
La lettre au PS, échoue entre les mains d’un substitut de Vandenbrouck dans ce bureau du FOREM où les destins se jouent.
Je ferme les yeux plusieurs fois, espérant les rouvrir sur une humanité fraternelle. Peine perdue. »

Dehors, il pleut et Dobeliou rempile pour quatre ans. Le discours se doit d’être cohérent. Certes. Mais comment rendre compte de ce qu’on rêve ? Est-ce que la vie est cohérente ? Est-ce que ce que nous faisons a un sens ? Alors, pourquoi le rêve en aurait un ?

13 décembre 2004

Les larmes de Marie Arena

Petit quart d’heure de stress de Marie Arena, dimanche à la RTBf à propos des 300.000 euros dépensés en rénovation de son cabinet ministériel, ce qui laisse à penser que le budget pour l’ensemble va atteindre des sommets.
Aussi étonnant que cela paraisse, je n’en veux pas particulièrement à la ministre que cette rénovation commence par son bureau avec rien que pour sa table de travail 4.000 euros, alors qu’on sait bien que le mobilier ancien n’était pas si misérable que cela.
Par ailleurs, des sommes sont prévues indépendamment des dépenses pour le bâtiment qui abrite les services de la ministre, comme, par exemple, le renouvellement de certains mobiliers scolaires ainsi que la réfection des locaux abritant des élèves, et bien d’autres enveloppes suivant la nomenclature qui en a été dressée dans des documents accessibles au public.
Elle a parfaitement raison de le signaler. Ce qu’elle a ordonné n’entre pas dans une possible infraction ou une malversation quelconque. Le ministre du budget a approuvé les dépenses qu’avait avant lui votées la Communauté française, sinon le parlement wallon.
Ce qui est en cause ici n’effleure même pas l’esprit de la ministre, comme l’esprit de tous ses confrères et consoeurs. L’argumentaire de Kubla, qui n’en est pas encore revenu de la façon avec laquelle il a été éjecté de son fauteuil de ministre, est tout aussi dénué de sens.
Qu’enfin pour sa défense, Marie Arena revienne à son origine modeste suivant le couplet « fils d’ouvrier, petits fils d’ouvrier, ouvrier moi-même… » assortissant l’exposition publique de sa jeunesse « pauvre » d’une larme, met le comble à ce sentiment étrange que j’ai depuis toujours vis-à-vis de ces gens de pouvoir qui fait que je me demande de quelle planète ils sont ?
C’est cela qui est en cause, finalement dans le cas d’Arena et en le dépassant de toutes celles et ceux qui posent leur cul sur les cuirs souples des fauteuils ministériels. Mais pour qui se prennent-ils ? Ont-ils à ce point perdu conscience qu’ils sont là pour le bonheur des gens et non pas le leur ?
Qu’est-ce que cela veut dire « la vitrine » du pays, quand il pleut sur le fonds de commerce et que le magasin est en ruine ?
Quand on voit l’état des lieux de la Wallonie toute entière, le délabrement des endroits où nous envoyons nos enfants à l’école, la situation catastrophique de nos enseignants dont beaucoup ne gagnent pas 1200 euros par mois, quand on nous montre les dépendances et les bureaux en piteux état de notre magnifique palais des Princes-Evêques consacrés à la Justice et tant d’autres bâtiments utiles à la collectivité, l’état des lieux de certaines casernes de pompier, des administrations communales dont les plafonds percent et les planchers menacent de se rompre, on est sidéré que les ministres aidés des parlementaires n’aient pas plus que cela le sens du devoir et de l’urgence.

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Austérité pour eux, austérité d’abord et avant tout pour leurs locaux, tel est, à mon avis la référence dont ils devraient user dans la pratique du pouvoir.
J’aurais été fier de Marie Arena si elle avait refusé les subsides coulant à flots pour son ministère, se contentant d’un modeste ravalement, tant que le dernier des enfants wallons n’ait pas été logé dans une école propre, et assis sur des chaises adaptées à sa taille et à son confort, tant que le dernier tableau n’ait pas été pourvu de sa craie et le dernier instituteur n’ait pas touché le lot de matériel didactique nécessaire, et tout à l’avenant pour le reste, pompier, police, justice, tout enfin qui donnerait aux Wallons le goût d’entreprendre, la satisfaction d’être dans un cadre agréable et propice aux performances, la fierté d’avoir été compris.
Qu’on ne vienne pas me dire que les budgets ne sont pas les mêmes et que l’on parle de deux choses différentes. Quand on nous pompe les taxes directes et indirectes, ces messieurs ne se demandent pas si les sommes récoltées seront attribuées à tel ou tel poste. C’est après que les décisions sont prises. Si on octroie des millions d’euros à la réfection d’un bâtiment ministériel, c’est toujours indirectement, un enfant quelque part qui va s’asseoir par terre en attendant qu’on trouve des sous pour lui acheter une chaise.
Le vrai rôle d’un grand ministre, c’est de rappeler cela.
Ce dont nous manquons à gauche, comme à droite.
Oui, je suis sensible aux larmes d’une femme, fût-elle ministre. Mais combien elles auraient davantage touché mon cœur si elles eussent été de compassion pour ceux qui n’ont rien ou pas grand-chose, des larmes d’une femme qui s’affligerait de l’état de dénuement général, et qui stigmatiserait les impudents qui se moquent de la détresse, ceux qui, lorsqu’ils versent une larme, ce n’est jamais que sur eux-mêmes.

12 décembre 2004

Tintin ne portait pas à gauche

Le mystère demeure sur l’éternelle jeunesse des héros de bande dessinée. Ils traversent le temps sans dommage. Trente, voire quarante ans après et quelques dizaines d’albums plus tard, Lucky Luke a toujours ce visage lisse du cow-boy de trente ans qu’on lui a connu à sa première chevauchée. Mieux, son cheval Jolly Jumper, à tout jamais aura la croupe élastique et le sabot aventureux d’une jument de cinq ans. Car, à défaut de lui en voir pousser une derrière la ventrière, on peut croire Jolly Jumper femelle.
Mais comment font-ils pour ne pas vieillir ?
Sur dix ou quinze enquêtes du commissaire Maigret en feuilleton TV, Bruno Kremer a pris vingt ans. Le crayon du dessinateur a cette supériorité évidente sur l’homme, qu’il plonge le héros dans un bain de jouvence qui fige les traits à tout jamais.
Par contre, les traumatismes, les blessures par balle, les disparitions dans des torrents, les cascades dans le ciel sans parachute et les miraculeuses résurrections mettent les comédiens et les personnages dessinés sur le même plan d’invulnérabilité. Uma Thurman n’aurait jamais pu tourner Kill Bill II si elle avait subi en réalité tous les traumatismes et accompli les prouesses physiques de Kill Bill I.
…..
Le personnage de bande dessinée à la fois le plus populaire, le plus asexué et le plus éternellement adolescent, donc le plus mystérieusement fascinant, est sans conteste Tintin.
Quel âge Hergé donne-t-il à son héros ?
L’âge de la majorité légale. Il ne pouvait en être autrement, tant l’indépendance, les voyages, les relations du personnage, auraient obligé ses parents, à moins de 18 ans, d’exercer sur lui une tutelle incompatible avec l’autonomie que Hergé lui donne.
Donc, c’est entendu, Tintin a 18 ans.
Tout le monde sait qu’à cet âge un journaliste crève de faim. Il pointerait plutôt au chômage. Admettons qu’un héritage ait dispensé Tintin de pourvoir à ses besoins !
Mais alors, s’il est oisif et autonome à 18 ans, il présente un sacré retard pubertaire. Passons sur sa petite taille, Hergé l’a voulu ainsi. D’ailleurs, les petits n’en sont pas moins virils.
On a beau dire que l’auteur est issu d’un milieu catholique strict, mais quoi, à dix-huit ans et cela pendant les soixante années qui vont suivre, jusqu’à la dernière aventure avec les Picaros, pas un seul petit flirt, pas la moindre romance ! Où faut-il chercher cette absence de pulsion ? Dans le secret désir d’une vie monacale d’Hergé qui fut pourtant marié et avec, ma foi, pour ce qui concerne sa veuve, une fort jolie femme ou dans l’illustration « pour enfant » qui interdit toute sexualité, mais qui permet bien des violences ?
Des chercheurs canadiens se sont penchés sur l’impuissance d’un jeune homme de dix-huit ans, qui mourut vierge soixante années plus tard, en même temps que son auteur.
Une seule hypothèse. A contrario des autres héros de bande dessinée et des comédiens des films où les violences sont fictives, Tintin aurait réellement subi 50 pertes de connaissance parmi les 23 albums de sa carrière, 43 résulteraient d’un traumatisme crânien dus au contact de divers objets contondants, des blessures par balles, des explosions, des accidents de voiture, un empoisonnement au chloroforme et de nombreuses chutes.

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Hergé ne dit rien des cliniques et des longues convalescences de son héros. On peut imaginer que cet éternel traumatisé n’avait plus la force de satisfaire ses pulsions sexuelles. Tintin aurait-il été plus discret parce qu’homosexuel ? Les années 30-40 n’étaient pas tendres pour ce genre de transport amoureux. Cela expliquerait les silences de Hergé en même temps la longue amitié que son héros et lui-même ont eue pour Chang,
Ce refoulement n’expliquerait pas à lui seul les retards de croissance et l’arrêt de la puberté, l’onanisme des internats de l’époque non plus.
On sait que certains adolescents subissent une intervention chirurgicale pour garnir les bourses des glandes reproductrices. Les dessins des pantalons golf de Tintin, désespérément indemnes de toute boursouflure, laisseraient supposer que Hergé l’a voulu sans testicule. La Castafiore malgré son côté hyper mature, avait quand même les attributs visibles d’une femme. Et dans cet univers sans sentiment, elle pouvait faire illusion. Mais, non. Tintin resta de marbre.
La platitude de la libido de notre héros est proprement déroutante. Tintin et Hergé n’ont pas laissé de descendance. Est-ce un signe qu’ils s’identifiaient l’un à l’autre ?
Il conviendrait pour aider la science que la veuve d’Hergé nous fît quelques confidences ou laissât à la postérité quelques codicilles révélateurs à un testament sans doute mieux garni en valeurs boursières, qu’en témoignages.
Quand on voit le raffut de l’opinion internationale pour connaître le fin mot du décès d’Arafat, ainsi que l’intérêt que nous prenons à la feuille de température de Viktor Iouchtchenko, candidat à la présidence en Ukraine qui prétend avoir été empoisonné par des agents secrets, on se demande pourquoi nous avons conservé vis-à-vis de Tintin une retenue que nous abandonnons si aisément par ailleurs au nom de la recherche de la vérité historique.

11 décembre 2004

Bureau.

- Bonjour, toi. Tu sais pourquoi on est là ?
- Salut, fils. D’habitude, c’est Fabrizio qui convoque.
-Cette fois-ci, c’est André.
-Voilà Anne-Marie.
-Ne lui pose pas la question. Elle ne sait rien.
-C’est drôle un mardi. Bonjour, citoyens Jean-Pol et Paul.
– Citoyenne Anne-Marie.
– C’est le jour du golf avec Guy, le mardi…
– Il paraît qu’on va parler de la rénovatite aigüe de Marie.
– Tu étais là, Josée ! Je ne t’ai pas entendue venir…
– Naturel. Tu as vu ses mocassins ?
– Des Marlboro, mon cher, pur Texans !...
– Voilà Kim. On va pouvoir commencer.
– Tu sais bien que c’est Didier qui prend les présences.
– Il dit cela parce que quand on voit Kim, on voit Didier.
– On dit que se sont les femmes qui ont de méchantes langues !
– Le défilé d’hier soir était superbe.
– Oui, j’ai acheté un ensemble beige, avec un chemisier saumon, ce sera parfait.
– Tu vas à Namur ?
– J’ai une tribune pour l’avenir des femmes dans le monde.
– Je n’ai jamais compris pourquoi Laurette n’avait qu’une voix consultative ?
– Bonjour tout le monde.
– Salut Robespierre…
– Appelle-moi Rudy. Si tu veux bien.
– Tu tombes bien. J’ai ma Breitling qui retarde.
– Je fais Robespierre ou Beaumarchais ?
– Tu avais la même, si je ne me trompe ?
– Non. Tu confonds avec Kar-Heinz. La mienne, c’est une Rolex.
– Belle pièce.
- Je te laisse. Je dois voir Josée. Je la vois qui parle avec Philippe. Josée !...
– Oui, Jean-Pol.
- Tu as toujours ton mas près de Ramatuelle ?
– Oui, Jean-pol.
– Tu connais le père André ?
– Le spécialiste des lauzes ? Oui, la semaine dernière, il travaillait sur mon toit.
– Juste pour avoir son numéro de téléphone. J’ai une fuite dans ma grange.
– Tu as gardé la villa finalement ?
– Oui. Ma femme aime cet endroit.
- Je sais. C’est beau par là.
– Que de maux nous promet cette triste journée !
J’y dois voir ou ma fille ou mon fils s’immoler !
– Je te l’ai dit cent fois, Louis n’est que consultant, mais il a le bras long !
-Que n’ai-je bien la moitié de ses mandats.
- Réciter du Corneille à dix heures du matin !
- Tu sais la dernière ?
- Non.
-Moi non plus.

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– Mes chers amis, un peu de silence. Sandrine, ferme la porte, s’il-te-plaît. Marie, sois gentille passe-moi le thermos. Je sais, le bureau a été avancé de deux jours. Je devais faire un parcours avec Guy, mais le terrain a été endommagé par les fortes pluies. J’en ai profité pour finir l’ordre du jour de la semaine dernière et surtout pour demander votre avis sur des faits importants. Je passe les points 3 et 4 concernant l’avancée du chômage, le point 5, l’état de pauvreté et des statistiques alarmantes, et enfin le point 6 sur les statistiques catastrophiques de l’enseignement en Wallonie, pour en arriver au point 7, le sondage de François Hollande, chez nos amis français avec le succès du oui et le dilemme qui nous préoccupe. Faut-il oui, ou non, procéder au même sondage dans le parti ? Moi, je suis contre. Et enfin le point 8, la fin du Blok et les débuts du Belang sur l’opinion flamande. Mais tout de suite le point 7. Y a-t-il des avis contraires au mien ? Personne, alors adopté. Nous passons au point 8 qui sera, je le crains, fort long. S’il nous reste un quart d’heure, nous en finirons avec les points 3, 4 ,5 et 6.
Quelqu’un veut prendre la parole sur le point 8 ?

10 décembre 2004

Flaubert « L’idiot de la Famille » ou les embarras du psy.

L’étude sur Gustave Flaubert par Jean-Paul Sartre en trois volumes, nous invite après ses 2801 pages à repenser la psychologique de l’auteur de Madame Bovary.
En gros, Gustave est un mal aimé qui a très mal pris que Achille-Cléophas, son père, se soit désintéressé de lui quand, ce père, notable rouennais, médecin-chef de l’Hôpital de la Ville, s’est aperçu que le petit Gustave atteignant sa sixième année ne suivait pas les traces de son grand frère et rechignait à la lecture, offrant le spectacle navrant d’un idiot, « L’idiot de la famille » comme titre Jean-Paul Sartre.
D’où l’immense rancœur de l’enfant et son envie non seulement de rattraper le temps perdu, mais encore de prouver au médecin-philosophe qu’il est meilleur que son aîné, mais aussi que l’auteur de ses jours.
Le petit Gustave n’en sortira pas indemne. Il finira même par éprouver une haine sourde vis-à-vis de son géniteur, qu’il ne pourra manifester ouvertement que par la détestation de la terre entière.
Las ! les heures de gloire arrivent avec le parfum de scandale qui entoure la publication de Madame Bovary, mais il est trop tard. Son père meurt avant l’engouement du public.
La seule personne auprès de laquelle il aurait aimé être célèbre n’est plus là pour qu’elle reconnaisse ses torts devant la famille Flaubert réunie. L’ordalie entre le père et le fils n’aura pas lieu.
Flaubert achèvera sa vie en 1880 dans la détestation de la bourgeoisie, alors que lui-même en est issu, non pas entraîné par l’idée nouvelle du socialisme, les publications fortes de Zola, la semaine sanglante de la Commune de Paris, mais, au contraire, par le goût d’une société d’Ancien Régime qui l’aurait ennobli, comme savaient le faire les monarques absolus, distinguant le mérite et abaissant le bourgeois.
Je passe sur ses amitiés exclusives avec Louis Bouilhet, Le Poittevin et sporadiques, avec Maxime Du Camp, ses élans et réticences envers sa maîtresse, Louise Colet, tout cela égrené de façon percutante dans son admirable « Correspondance », pour seulement resituer « l’esprit » du temps que Gustave partagea avec Jules Renard, Léon Bloy et Maupassant et me poser la question de savoir quel a été l’élément le plus déterminant qui lui permit de pousser les feux de son ironie ? Etait-ce la détestation du père ou une critique du romantisme fin de siècle, que Hugo et les autres amants de Louise incarnaient si bien ?

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Si l’on considère l’humour comme étant l’art de traiter gravement des choses légères, Flaubert en était dépourvu. L’humour est la vengeance symbolique d’une personne outrée par l’absurdité du monde et la misère qui frappe d’indignité une bonne partie de l’humanité. Flaubert, de tout son orgueil, méprisait bien trop ses contemporains pour souhaiter les convertir à quoi que ce soit. Par contre, sa manière de traiter sans avoir l’air d’y toucher des choses graves avec légèreté, montre à satiété qu’il maniait l’ironie comme personne. Il a souvent avancé le nom de Corneille dans sa correspondance, comme s’il s’en était inspiré. Corneille n’avait à ses yeux pour seul mérite que d’être né à Rouen comme lui, et, peut-être d’avoir écrit de belles et fortes pièces de théâtre, ce que Flaubert, comédien-enfant avant d’être romancier-adulte n’a jamais réussi. Dans l’œuvre de Corneille pas le moindre soupçon d’ironie. Quant à l’humour, s’il en est, il est le plus souvent involontaire.
C’est bien dans la haine de son père, envahissante, faute de pouvoir l’exprimer, que Flaubert a puisé son ironie. Jules Renard qui avait pour Flaubert une admiration profonde y a trouvé les raisons d’y détester sa mère et d’en témoigner par une ironie aussi dérangeante que celle de son aîné, principalement dans son journal.
Aujourd’hui, nous traversons une époque si médiocre que même les mots font peur, tant et si bien que la folie des hommes nous interdit l’usage de certains mots dénoncés comme contraires à la Loi. Gustave Flaubert aurait certainement pratiqué l’ironie plus que jamais, s’il eût été notre contemporain. Peut-être eût-il remonté dans le temps et égalé Chamfort ?
Qui sait, par crainte que la bêtise n’assassinât Socrate une seconde fois, se fût-on satisfait, en 2004, d’appeler son « outrage » de l’humour noir, le laissant travailler en paix une matière, la nôtre, fort critiquable, bien que nos « élites » intégrées n’en conviennent plus ?

9 décembre 2004

La Saint-Nicolas des étudiants à Liège.

- On est tous pareils, groupés au bas de l’immeuble. Si encore on avait un local ! Si c’est pour compter celui du quartier ou l’autre, mis à disposition par la Ville, merci. On peut même pas fumer du shit tranquille ! L’éducatrice dans ses activités à la con, poterie et décoration, on n’en a rien à battre. A vingt ans, on se pose plus la question de savoir si on fait aquarelle ou gravure, mais comment on va pouvoir bouffer d’ici la fin de la semaine.
- C’est vrai quoi. On reste dans les cages à s’asseoir sur les escaliers. On cause. On trouve des histoires marrantes, des coups qui ont foiré. On rigole avec ce qu’on peut, des histoires de gonzesses bonnes à tirer ou des thons. On se casse pas le fion à trouver du boulot, puisqu’il n’y en a pas, surtout quand l’embaucheur voit nos gueules.
- Quand on a de la thune on s’achète des bombes de peinture. Moi, c’est le jaune. C’est chic, c’est fluo avec le rose…Histoire de faire chier, on tag… C’est pas qu’on aime, sûr que c’est dégueulasse, mais au moins on laisse une trace qui nous ressemble. On l’effacera pas facile. Ce qui compte, c’est qu’on existe, qu’on n’est pas crevé. Faudra prendre patience.
- Rapport aux études, on est tous de technique, des apprentissages longue durée pour des métiers à la con. Personne sait résister. L’autre abruti qu’explique comment il est heureux à poser des briques pour faire un mur, un jour, ça passe, c’est nouveau, on se prendrait bien une heure à faire du Lego grandeur nature, mais un an !... Douleur, en quinze jours, on devient enragé… personne sait résister. Parfois t’as un jeune prof de français-morale qu’on est près à chahuter, mais qu’est proche de nous par le cœur, qui sait comme ça fait chier la technique, alors, il nous sort des histoires, avec des mecs comme nous qui s’en sortent quand même. Prends Truffaut et ses quatre cents coups. Voilà un super.... Ce prof, nous explique qu’on passe à côté de quelque chose, mais bon… son cours, ça dure pas longtemps, une heure de temps en temps… Alors, du fond de la classe, on se dit qu’il nous bourre le chou aussi.
- J’ai connu un fils à sa môman qu’a plus souffert que tout après professionnelle. On peut dire que lui écoutait, notait, et se débrouillait pas mal à l’atelier. Vous pensez, enfin un élève doué pour les merdes… Autant, l’orientation nous déconseillait tapissier-garnisseur ou plombier-zingueur, autant lui pouvait prétendre à tout… le bel avenir. Mon cul, oui. Quand il s’est retrouvé chez Bingkom, le roi du sanitaire étanche, il a souffert plus que les autres qui s’en foutaient et envisageaient pas la carrière complète. Il allait jamais vite assez. L’école, c’était que des étrons poilus que lui gueulait Bingkom, des enculés, la procédure pour le dépôt de bilan. Francis avait pas le tour de main qu’était bon pour tenir jusque la fin de la garantie. Bingkom s’en foutait après, vu qu’on allait peut-être le faire revenir pour une retouche.
- Tu veux parler de Francis qu’était en réalité Abdul ?... qui s’est fait jeter de chez Bingkom pour incompétence ? Le pauvre, ils s’en est jamais remis. Il avait pas compris que le grand art, la technique, c’est bon pour la frime, que voilà longtemps que les patrons se la mettent au cul la technologie ! Il est au CPAS avec le grand Léon. Ils font ménage. Il fait la manche au Pont d’Avroy. Je lui ai donné une pièce. Il est tombé plus bas que nous !...

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- Nous au moins, pour ce qui est de leur bazar social, on a compris. T’arrives tout mouton. On te rate pas. Diplômé ou pas, tu sors enragé comme si tu sortais de tôle ! Tu vaux rien, c’est entendu. Bon, d’accord. On vaut rien. Mais on t’emmerde. On ne marche plus. Tu ne nous feras pas reluire de bons sentiments, de tes espérances, de ton look et de ton programme. T’es qu’une affiche, une propagande, même pas pour du boulot convenable, t’es là que pour nous avoir, t’as qu’un but, nous fermer la gueule et nous faire marcher au pas. Une deux, une deux… apprendre le règlement, ce qui faut faire pour que ça dorme paisible, et ce que tu risques si tu emmerdes le beau monde.
Formaté au moins offrant, t’es coincé dans les waters. Si personne tire la chasse pour t’évacuer avec sa merde, t’as une chance. T’es là, tu gênes pas. On t’ignore, mais on te tolère. T’as même le droit au bout d’un moment de passer le rouleau à qui s’essuie le cul. Si t’es vraiment bon, on te confiera un trou de balle que t’aura à récurer pour passer technicien.
- Franchement quoi, on peut encore leur en faire baver à ces empaffés, juste pour que ça soie pas trop monotone d’ici à ce qu’on crève. T’as un exemple. A l’autre bout de la chaîne, t’as les brillants, les grosses têtes qu’ont les moyens d’aller se branler dans les locaux de l’Unif. Hier, c’était leur Saint-Nicolas. Fallait voir les flics à leur cul, les circulations détournées, le bordel que c’était centre de Liège. Ö, c’était pas bien méchant, les futurs bourges mêlés aux frimeurs sans le sou essayaient la police, pour quand ils en auront besoin … Je me disais, en voyant la tornade des cache-poussière aussi dégueulasses que mes caleçons, merde que ce serait beau si tous les jeunes pouvaient descendre en ville pour autre chose que des conneries ! Tiens, qu’on pourrait dire, mais cette jeunesse-là, elle veut plus se faire formater la capsule, elle veut de l’espoir, elle a le pouvoir de secouer le cocotier, de dire à tous les pourris qui s’empiffrent à la soupe du bon ton, qu’aujourd’hui c’est la vraie Saint-Nicolas, celle de la réalisation des projets pour l’homme qu’est dans la rigole, qu’il doit plus avoir peur des sales cons qui poussent à reproduire leurs conneries d’une génération l’autre… Qu’on veut faire autre chose, nom de dieu, pour plus que la misère gagne, pour fermer la gueule aux belles théories… Une vraie Saint-Nicolas, quoi !...

8 décembre 2004

Noël dans la quatrième dimension (âge)

- Bonjour, monsieur Sigebert, voici de la part de Saint-Nicolas.
-Merci.
-Et alors, ça va ? Vous êtes content ?
- Non. Ça ne va pas et je ne suis pas content.
- Eh bien ! tant mieux. Tous les pensionnaires ne sont pas comme vous.
-Puisque je vous dis que ça ne va pas.
- Toujours à rouspéter sur tout. Vous ne croiriez pas. Tandis que vous…
- Quoi, moi ?
-Vous ne vous plaignez jamais. Vous êtes heureux…
-Puisque je vous dis que ça ne va pas !
- On organise une partie de scrabble demain au réfectoire. Vous qui êtes fort en français.
-Combien de fois faudra-t-il vous dire que ça ne va pas ?
- Vous pourrez vous mesurer à la patronne. L’autre jour elle a fait un mot en huit lettres.
- Sybarite.
- Vous l’avez retenu ! Quelle mémoire !
- Oui, parce que c’est tout ce qu’on n’est pas.
- Oui, vous avez raison, ici, on est bien.
- Un sybarite c’est quelqu’un qui est attaché au confort, aux délicatesses…
- Oui, c’est ce que je dis.
-Ici on crève de faim. Le patron nous vole. La patronne se moque de nous et vous, vous leur cirez les pompes.
-Vous préférez regarder le tennis à la télévision, seul dans votre chambre ? C’est dommage pour notre vie associative…
-Quoi notre vie associative ? C’est la Croix-Rouge qui distribue des livres, vous, vous êtes stagiaire, vous ne leur coûtez rien et quand vous passez nous livrer une bouteille de Spa, vous nous la comptez à 1 euro !
- C’est bien ça de boire de l’eau. On ne boit jamais assez.
-Surtout à ce prix là.
-Demain vous aurez un repas de Noël.
-C’est quoi ?
-Purée aux carottes avec un bon morceau de saucisse.
- Des carottes cuitent à l’eau ?
-Avec quoi voulez-vous qu’on les cuise ? Vous vous plaignez que la bouteille de Spa est à un euro, puis vous vous plaignez qu’on cuise les carottes à l’eau !
- C’est pas avec du Spa à un euro qu’on cuit les carottes…
- Voyons, Monsieur Sigebert, ne nous rendez pas la tâche difficile.
-Si vous nous rendiez le séjour agréable, je ne vous rendrais pas la tâche difficile.
- Dites que c’est de ma faute que vous n’avez pas le moral ? Et puis d’abord, vous n’êtes pas bien ici ?

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-Je vous ai déjà dit que non.
- Vous avez tout à votre portée. Des aides-soignantes dévouées, un service impeccable, une grande salle où vous pouvez assister à des concerts…
- Là dernière fois, c’était un accordéoniste avec sa femme qui nous a fait chanter « La Madelon », plus personne avait fait 14-18, sauf elle…
- Tout le monde a trouvé le spectacle magnifique.
-Comment pouvez savoir ? Vous dormiez déjà au Beau Danube bleu !
-Enfin, je peux mettre sur mon carnet que vous ne vous plaignez de rien. Juste que vous êtes un peu mélancolique.
- Puisque je vous dis que si…
-Allais, je vais mettre que l’accordéoniste a fait quelques fausses notes…
- Et qu’on mange de la merde, que la patronne est la reine des salopes et que le patron gratte sur les prix des médicaments. Le cuistot, est d’après lui, un ancien colonial. Je comprends qu’il soit revenu dare-dare de Kin, sans quoi, en brousse, c’est lui qui passait dans son court-bouillon.
- Comme vous êtes drôle ! Je ne me lasse pas de vous entendre. Un peu triste l’âge venant, comme les autres pensionnaires… Nous passerons tous par là.
-Plus gagas qu’ici, c’est pas possible. En pleine agueusie, sourds et débiles, ils avalent les merdes du cuistot qu’ils trouvent excellentes, se tapent tous les concerts d’accordéon et bouffent même les lettres en plastique du scrabble. Ne dites pas non, il en manque toujours une ou l’autre après chaque partie, si bien que les plus anciens jeux ont moins de trente lettres… On ne peut plus y jouer qu’à deux…
- Je suis heureuse, Monsieur Sigebert que vous trouviez le séjour agréable. Je vais le dire à Madame… seulement, vous avez des bouffées de tristesse. Ce n’est pas grave. Je le dirai au docteur Lefébure.
-C’est ça. Vous direz à cet escroc que le jour où il fait les tensions à tout un couloir, qu’il ne prenne plus des visites « domiciles » à tous ses patients.
-Comme vous vous échauffez ! Vous n’êtes pas joyeux aujourd’hui. Allez, cela ira mieux tout à l’heure. Quand serez-vous raisonnable ? Hi hi hi….

7 décembre 2004

Entretien

- Roger, tu cherches ?
- Oui, je cherche.
- T’as trouvé ?
- Pas encore.
- Tu cherches vraiment ?
- Tous les jours.
- Et t’as pas trouvé ?
- Je te l’ai dit, non, pas encore.
- T’as des preuves ?
- Comment ça ?
- Oui, des preuves que tu cherches ?
- Parole tu te prends pour Freya Van den Bosshe.
- Tu fréquentes la ministre de l’emploi, maintenant ?
- Tu sais bien que non.
- Tu me prends pour qui ? T’as sa photo dans ton portefeuille !
- Tu fouilles mon portefeuille à présent ?
- Même que derrière il y a son prénom Freya et Leefmilieu en-dessous ;
- Oui, l’année dernière elle était ministre de l’environnement SP.
- Qu’est-ce que tu fais chômeur avec la photo d’une ministre dans ton portefeuille ?
- C’est parce que j’ai été vert et qu’elle est groen.
- Je ne vois pas le rapport. Par contre j’en vois un si tu ne cherches pas.
- Statistiquement c’est impossible à trouver.
- Comment ça ? Tu me dis que tu cherches, puis que c’est impossible. Si c’est impossible, pourquoi tu cherches ?
- Parce que si je ne cherche pas quelque chose qui est introuvable, la Freya va me diminuer mes allocations.
- Est-ce que j’ai la photo de mon patron dans mon portefeuille, moi ?
- On a augmenté de 17.276 sur un an, nous les longues durées, soit plus de 11 %.
- Et alors ?

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- Ça veut dire qu’on a 11 % de chance en plus à rester longue durée.
- Et alors, qu’est-ce que tu veux que ça me foute ?
- Freya la socialiste dit la même chose.
- Elle a bien raison. Au moins avec elle, tu vas bouger ton cul. Tandis qu’avec moi…
- C’est toi qui bouges le tien…
-Tu deviens vulgaire.
- J’en ai marre de courir. Je ne vais plus sonner aux portes pour chercher du boulot. Je sonne aux portes pour qu’on me fournisse une attestation que je cherche du boulot.
-Au moins, là, t’es servi, c’est gratuit une attestation !
- L’attestation, c’est encore plus rare que l’entretien d’embauche !
-Forcément, si les patrons s’aperçoivent que tu ne cherches que l’attestation prouvant que t’es passé….
- Ô destin contraire ! femme enragée, je cherche et je ne trouve pas. Ô femme cruelle ! à défaut de trouver du boulot, une attestation ferait bien mon affaire. Même pas ça. On ricane et on te répond pas. On te claque la porte au nez Tu crois que c’est une vie ?
- Comment se fait-il que des industriels se plaignent qu’ils ne trouvent pas des gens de métier ?
-C’est des emplois spécialisés qu’on trouve pas, et encore. On te raconte ça pour t’endormir, pour faire croire qu’on est des impénitents paresseux, des bons à rien…
- N’empêche qu’on a besoin de soudeurs à l’arc et à l’autogène, des grutiers, des maçons, même Monseigneur Léonard se plaint qu’il manque de curés.
-Moi, je suis licencié en philosophie et lettres. Je peux pas faire grutier.
- T’es surtout licencié, mon pauvre vieux. Pourquoi tu ferais pas curé ?
- C’est qu’on est marié ; Et puis je ne suis pas catho.
- Tu vois comme t’es ! Tu trouves toujours que t’es pas si, que t’es pas là… A l’embauche, monseigneur Léonard te demandera pas ta confession. Il peut pas. C’est la loi.
-Quand même pour faire curé !
-Quand on n’a plus le sou, on prend n’importe quoi.
- C’est facile à dire.
-Et Procureur général à Liège, près de chez nous , Ça te dit rien non plus ? T’as même pas postulé ! Tu vas pas me dire que tu ferais pas comme Cédric Visard de Bocarmé ? T’as des manières, un diplôme, un profil, l’air constipé quand tu veux. Quand tu mets ton beau costume, on voit pas que t’es chômeur…
- Je crois plus à la justice !
-Tu crois pas aux curés, tu crois plus à la justice. Tu crois encore à quoi ?
- Je crois que tu commences à m’emmerder et que l’entretien est terminé.
- Merde Roger, t’es ici dans mon bureau, au Forem et c’est moi qui décide si l’entretien est terminé. Ecoute, je vais m’arranger avec ma chef pour conclure que t’as fourni des pièces à ton dossier et que tu cherches réellement du boulot. Mais, fais gaffe Roger. Peut-être que la prochaine fois tu tomberas sur Lardinois. C’est un malade, celui-là, il te ratera pas.
- Qu’est-ce que tu veux pour ce soir ?
-Reste du lapin d’hier. Prépare une poêlée paysanne. En sortant fais entrer le suivant.
-Passe pas tes nerfs dessus.
-Ta gueule et ferme la porte.

6 décembre 2004

Une Loi de plus...

On aura rarement vu une Loi aboutissant à son contraire que celle instituant un délit de l’injure à caractère raciste et antisémite.
Comprenons-nous bien, un honnête homme doublé d’un humaniste ne peut que détester un énergumène qui tient des propos de nature à discriminer la personne différente de ce qu’il est et prétend représenter. Là-dessus, il n’y a aucune contestation possible. Mais, décréter que certains propos tenus en public sont des délits, c’est franchir la frontière qui sépare un espace de liberté, à un espace despotique où s’évalue la conscience du citoyen..
Donner aux juges le pouvoir de punir en fonction des propos à caractère raciste et discriminatoire, c’est rouvrir le vieux débat sur la censure, permettre à terme au code d’élaborer un tarif des peines des mots interdits : six mois pour « Bougnoule » et douze pour « youpin », par exemple.
On en arrivera à considérer deux termes qui n’apparaissent racistes qu’en association. Par exemple le mot « sale » peut devenir l’élément d’une injure, accolé aux nationalités du monde entier.
Voilà une première stupidité.
La deuxième concerne directement l’ex Vlaams Blog devenu Vlaams Belang.
Le tribunal de Gand a condamné le Vlaams Blok pour racisme et l’a interdit. Renaissant de ses cendres encore chaudes, ce parti est devenu Belang avec les mêmes dirigeants et les mêmes objectifs. Le Tribunal en condamnant ces gens, leur a fait perdre l’étiquette qu’ils avaient. Ils s’en sont collés une autre. Les démocrates y ont-ils gagné ? Est-ce bien malin ce qu’on leur a fait ? Ils vont vendre le même produit, mais camouflé sous une autre étiquette. Les militants ne seront pas surpris, le but de ce parti n’aura pas changé pour autant, mais les nouveaux adhérents pourraient, eux, s’y tromper.
Et puis, il y a les leçons que le Belang va tirer du Blok. Par exemple, il va prendre garde de commettre les mêmes erreurs, tout en conservant l’essentiel de ce qui a fait sa dangerosité. Il n’en sera que plus nuisible.
Un premier effet se fait déjà sentir. Les partis flamands ne tiennent plus les propos assez durs que tiennent encore leurs homologues wallons à l’égard du Vlaams Belang. Certains journalistes flamands libéraux et chrétiens, voire de tendance SP écrivent que la page du Blok a été tournée et qu’on ne pourra plus longtemps ignorer le plus grand parti de Flandre. Enfin, on en est à se poser la question dont la réponse fait peur à tout le monde : et si avec la publicité que l’on fait au Vlaams Belang, ce parti obtenait la majorité absolue en Flandre ?
Cette Loi ne change pratiquement rien dans le comportement raciste qui court les rues. Elle n’arrête pas la haine imbécile de l’autre. Il suffit d’entendre ce qui se dit des étrangers de couleur (1) pour comprendre que si la Loi devait être appliquée dans toute sa rigueur, les prisons du Royaume ne seraient pas suffisantes.
Les racistes qui plombent les organisations syndicales, les fonctionnaires, les petits patrons, les artisans, etc. ont appris à dissimuler leur vraie nature. Il sera difficile, sinon impossible de les démasquer. La Loi claironnée partout comme un avertissement les rendra prudents. Qu’y aura-t-on gagné ? Des esprits faibles et les parias d’une société mal en point, happés par les circonstances, subjugués par un argumentaire primaire, risquent d’emprunter une voie dont ils ne soupçonnent pas la pente fasciste.

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Et c’est un risque que les apprentis sorciers qui nous gouvernent ne mesurent pas suffisamment.
Qu’un Jean-Marie Le Pen surgisse de rien en région francophone, tribun subtil à la parole facile, et, avec ce qu’on entend dans la rue et la mentalité d’aujourd’hui, on pourrait craindre le pire.
A voir comme l’extrême droite tourmente les consciences et ravage les esprits des personnels politiques, alors que le chômage, les catastrophes sociales à la chaîne, le progrès de la pauvreté ne tirent plus un seul soupir des mêmes, on se demande si nos dirigeants ne cherchent pas la tuile qui pourrait leur tomber sur la tête.
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1. Je suis encore à me demander pourquoi les Juifs ont un statut de protection à part, puisque « antisémitisme » vient renforcer et chapeauter le racisme, alors qu’il n’y a aucun vocable pour stigmatiser le racisme à l’encontre des Africains et des Maghrébins, tout autant, sinon plus discriminés ?

5 décembre 2004

Vous avez dit bizarre ?

Les Wallons paient une taxe annuelle très lourde que les autres Belges ne paient plus.
Vous avez dit bizarre ?
Vous avez deviné qu’il s’agit des 142 euros 37 réclamés par la Région wallonne pour un téléviseur.
Ceux qui en sont exonérés sont les minimexés et les assistés que notre société fabrique abondamment et qui, de toute manière, n’auraient pu sortir de leur porte-monnaie une somme qu’ils n’ont pas.
Les Fouronnais l’échappent belle chaque année, enfin ceux que leur rattachement à Liège excitent encore. Malgré eux, ils gardent dans leur bas de laine 142 euros qui tombent à pic pour acheter une oie à Visé et un mousseux à Tongres, pour ne pas faire de jaloux.
Dans le surréalisme complet de la frontière linguistique, il doit se trouver des patelins dans lesquels le 23 en Wallonie abreuve nos happe-chair de Namur, tandis que le 25 remercie le gouvernement flamand de ne plus lui envoyer une invitation aussi désagréable.
Il y a toujours des raisonneurs pour nous faire savoir que cette taxe est nécessaire. Un des arguments évoqués est évidemment l’indépendance nécessaire de la RTBf.
Une grosse partie des consommateurs de la télévision francophone se cantonne à Bruxelles, or les francophones du lieu comme tous les Flamands qu’ils soient d’Ostende ou de la périphérie bruxelloise ne déboursent rien pour voir la même chose que nous.
En réalité, cette ponction sert à d’autres fins. Elle tombe dans le pot commun des taxes. On sait que ce pot n’a pas de fond. Et si par malheur notre ravissante ministre en chef, madame Arena, se penchant trop de la margelle tombait dedans, elle se retrouverait au Pays du matin calme.
En réalité les chômeurs et les pensionnés à la limite d’être minimexés sont les premières victimes de ce coup de fusil administratif. Déjà que les chômeurs de moins de vingt-cinq ans vont se faire descendre à vue par une camarilla socialiste à la solde des industriels, on peut dire que l’avenir est de moins en moins peint du rose qu’affectionnent les politiciens que l’on sait.
On dirait que chaque besoin irrépressible du citoyen comme mettre de l’essence dans le réservoir de sa voiture, ouvrir la télé pour les infos du soir, et même acheter des bouteilles d’eau minérale – que ces messieurs aillent voir les prix d’une Spa ou d’une Chaudfontaine dans les homes – déclenchent chez eux un appétit d’ogre à nous piquer nos quatre sous.
Il n’y a pas que pour la télé que ça ratisse large.

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Entendons-nous bien, une Communauté se gère avec notre pognon, bien entendu. Il faut débourser, c’est certain. Le problème n’est pas là. Il est dans l’effort demandé à chaque citoyen en proportion de ses revenus. Il est certain qu’un pensionné modeste va suer sang et eau pour payer la note. Ce qui ne va pas, c’est qu’on demande le même effort à un tonton qui se fait une galette qui équivaut à dix pensions. Il en va ainsi pour toutes les TVA et autres crocs à Phynance, c’est le populo, ceux qui ont le plus petit revenu qui contribuent le plus au maintien du navire à flot.
Le deuxième écueil, c’est que nous ignorons totalement comment et sous quelle forme notre pognon est redistribué.
Holà ! allez-vous me dire, des chiffres sont publiés, des bilans sont établis, la Cour des Comptes met les abus en évidence.
Pas si sûr qu’on puisse établir l’état des lieux si limpidement.
Perdurent d’abord les injustices dans les ponctions qui ne sont pas du domaine de la Cour, viennent ensuite la gestion administrative sous la tutelle des politiques qui ne s’avèrent catastrophiques que bien après que le ministre ait quitté son ministère et enfin le népotisme de fonction qui jette l’argent par les fenêtres quand il s’agit d’aider un beauf à gravir les échelons ou une entreprise publique à « moderniser » son cadre.
- T’as fini de râler dans ton coin ? T’avais promis d’aller chercher les enfants à l’école. Je vais chez la coiffeuse, figure-toi !
- Oui, chérie.
J’avais oublié l’obéissance, une vertu cardinale wallonne avec laquelle nous n’avons plus besoin d’un coup de pied au cul d’un ministre ou, pire, de l’injonction d’un huissier, pour accomplir notre devoir de citoyen.
Mieux, les zigues qui poinçonnent les détenteurs d’une télé, le jour des élections venu, nous voterons pour eux avec une ferveur renouvelée. Tant nous nous sommes persuadés que nous les aimons et qu’ils font ce qu’ils peuvent pour rester dignes de notre amour.
Van Cau, Daerdenne, Marie et Marie-Dominique, et tous les autres, je vous aime. Je suis sûr que vous ne le saviez pas. Je cours payer ma redevance.

4 décembre 2004

Liège en Strass, connerie et paillettes.

Toute la dégoulinante sucrerie de Star Ac n’a nulle autre ambition que de faire entrer des sous dans la caisse de TF 1.
Tout le monde le sait.
A commencer par les jeunes gens qui se croient danseurs parce qu’ils sautillent et chanteurs parce qu’ils ont un filet de voix.
Si ça marche, c’est que le gros du public en redemande.
Quand l’audimat est en hausse, la pub douille sec et Bouygues se fait des couilles en or.
Certains beaufs préfèrent le foot à la Star Ac.
Les clans se partagent entre les matchs et la frimousse de Hoda suçant un micro de son « joli accent du Sud ». Le sport et « l’art » finissent par tomber d’accord sur les chips et les canettes.
A Liège, question guignol, t’es servi. Ou tu t’emmerdes à la culture façon Chiroux ou tu t’envoies les « grands spectacles » des chaînes TV. Entre les deux « styles », c’est la zone. On y flingue l’esprit à vue, genre « café théâtre », rue Rutxiel, programme garanti deux ans après Paris, comme si personne à Liège prenait le TGV ; chez Sullon, t’as la choucroute en plus.
Fin d’année, c’est dur. Les Réveillons sont des entreprises lourdes à porter.
Le spectacle dit populaire n’a pas toujours été à l’usage des débiles légers.
La semaine de congé payé et la journée de huit heures dès 1936 n’auraient pas existé si les rigolades qu’on se payait dans ces années-là, n’avaient été que ça. Oui ! Monsieur, nos pères se foutaient de l’Autorité et des deux cents familles en même temps qu’ils se bidonnaient dans la variétoche. On ne peut pas dire que nos humoristes liégeois ont pris la relève.
On croit, bonnard comme on est, qu’on est entré dans l’aire des libertés qui se combinent avec un bien-être assuré et que tout progrès est automatique. On confond brosse à reliure et joie de vivre. Chaque année les lois nouvelles nous coupent un truc. On en est à surveiller le NET. Un mot de travers et on passe antisémite. Quand on n’est pas d’accord avec les bobos de gauche au pouvoir, on est suspect de faire la lèche au Vlaams Belang.

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Les petits jeunes de la Star Ac qui partent aux séances de claquette avec un cœur gros comme ça, c’est pas tant pour qu’on leur reconnaisse le talent qu’ils n’ont pas, c’est tout simplement qu’ils souhaitent prendre votre pognon, plus tard à la surprise, quand ils seront sur l’affiche du Forum aux réveillons 2006/7 et que privé de jugement par la lobotomie due aux circonstances, vous vous taperez un fauteuil d’orchestre à 50 euros.
Car, ils y croient, eux, à la Star Ac, au talent révélé, à la tournée mondiale et au compte en banque à la Picsou and C°.
Dans un sens, ces petites frappes veulent vous faire les poches pour plus tard. C‘est pas con quand on y pense, moins con, que le public qui se pressera aux grilles des concerts et qui mouille son froc à l’avance, quand Hoda pousse une roucoulante avec Tina Turner.
Côté garçon, toutes les petites gueules d’amour se ressemblent. Le prototype de la tronche standard, c’est Steevy, ex héro du loft, qui sévit dans l’équipe de Ruquier. Grégory de l’actuelle Star Ac est quasiment son clone.
C’est jeune, ça sait rien, mais ça ouvre sa gueule sur tout.
On s’emmerdait avant aux remises des prix de fin d’études. Le spectacle qu’on y donnait était lourdingue. On y allait voir son petit dernier. On s’attendrissait en attendant qu’il monte sur scène, et on se farcissait tout le programme des autres.
Les machines de TF1 et le tralala tapissé de billets de banque au moindre pet produisent un autre effet. Ce n’est plus le directeur d’école qui remet les prix, mais nous-mêmes avec les notes d’appréciation en plus. Alors, vous pensez, la belle promotion d’ignares incapables de mettre un sol sur une portée, comme ils jouissent de leur brusque compétence !
C’est monstrueux, on met en situation le cavalier La Violette qui deviendrait ministre de la guerre au lieu de prendre le train de 8 H 47 !
Je trouve que le populo vaut mieux que ça. Sa place n’est pas au plus bas dans l’art où TF1 et certains autres le situent. Après le turbin, les délassements idiots ne sont pas nécessairement les meilleurs pour désinhiber les gens de l’ennui d’une journée de travail. Les industriels des spectacles agissent comme les politiciens qui infantilisent leurs électeurs.
Il y a des potentialités ignorées même chez les beaufs. La bêtise est un virus qui n’est pas nécessairement inscrit dans les gênes. Parfois, on l’inocule, sciemment.
Ici, c’est pour le fric. Ailleurs, c’est pour le pouvoir.
En attendant, on passe au tiroir-caisse payer notre dû aux médiocres.
Vous prendriez du recul ? Les missionnaires de la bonne parole du fric prétendraient que vous êtes un prétentieux qui n’aime pas le délassement simple des petites gens.
Un comble, ceux qui vous abrutissent vous traitent de réac !

3 décembre 2004

Mariah si tu me lis…

Guère de chance de te rencontrer, cependant.
L’éloignement des cultures, des pays, des mœurs, la différence d’âge… rendent la chose d’une grande improbabilité.
Quoique cela n’ait pas d’importance, juste une petite frustration.
Pourquoi Mariah avec un « h » ? Consonance étrangère ou étrangeté volontaire ?
Ton vedettariat d’un genre particulier t’interdit-il de décliner ton vrai prénom ?
Pudeur ? Cela m’étonnerait. N’importe quel salopard peut détailler tes parties intimes et apprécier tes gestes les plus suggestifs, sans que tu puisses t’en défendre. Au contraire, le nombre de visites accroît ton bonheur.
Tu mets en scène tes instants d’émotion... un art consommé qui t’est venu d’une expérience inégalée à remettre cent fois sur le métier ce que la nature t’a donné à profusion.
Toutefois, il reste un point obscur à percer, pour tout autant que l’on puisse encore te percer quelque chose.
As-tu une nature tellement généreuse, au point que ton travail te procure autant de plaisir ou bien n’est-ce qu’un effet de ton art à jouer la comédie ?
Note que, nature généreuse ou talent, ces deux hypothèses prises séparément ou simultanément n’enlèvent rien à tes mérites.
Ta vitalité est étonnante. Un malotru, espèce fort répandue dans des métiers annexes de ton industrie, te donne 67 ans ! A cet âge, tu possèdes encore une belle capacité de plaisir que bien des femmes « honnêtes » envieraient. Une générosité naturelle, qui s’étend à tous tes partenaires : le caméraman, le portier de l’hôtel, les voisins de palier et la multitude des mateurs du NET, n’est pas ton moindre mérite, quand on songe aux efforts physiques que la Production exige de toi.

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J’en connais à ton spectacle qui vérifient illico sur leur personne ce que J.-S. Bach dans un élan mystique attribuait à la passion du Christ pour « que sa joie demeure ». Ce qui à notre époque vulgaire et irrespectueuse s’appelle une branlette.
Uniquement comédienne, ton mérite ne serait pas moindre sur un autre registre, celui plus complexe de l’art. Ce serait faire honneur à la corporation que des Deneuve, des Adjani et des Huppert t’adjoignent à elles lors des festivals de Cannes ! Dans la salle, plus d’un coquin auraient à ton égard des signes de connivences. En vérité, tu surpasserais tes rivales pour le prix d’interprétation par l’extrême sincérité de tes roucoulements suprêmes.
Tu t’adaptes à n’importe quel décor pourvu qu’un lit soit en plan large. Aucun autre accessoire n’est utile, sinon une étrange machine dans une caisse et qui ne sert qu’aux one woman show.
Tu nous offres à la fois l’art et la femme sans que l’un fasse fi de l’autre. Car, pourquoi t’avoir doté d’une mâchoire en or massif sinon pour nous donner l’occasion de te voir sans artifice, brut de décoffrage, a contrario de l’image de ces comédiennes toutes en implants mammaires et bridges dont la moindre faïence coûte le mois de salaire du premier accessoiriste et qui pour réussir une scène de sexe cherchent l’inspiration à Lourdes !

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Ainsi, dans la nudité de ton jeu, tu n’as besoin ni de guêpière, ni de prothèse, ni même de robe de chez Karl Lagerfeld pour étaler ton incomparable savoir faire, juste des bas noirs attachés à un porte-jarretelles des plus classiques.
Comme toutes les grandes, l’âge n’a pas entamé ton potentiel, on dirait même que la ménopause loin d’avoir stoppé ta carrière l’a au contraire projetée au plus haut à l’égal de Jeanne Moreau et de Line Renaud, tes homologues en longévité et talent. Ce qui, pour les autres femmes de cet âge qui peuplent le cinéma français, ouvre de vastes perspectives.
Chère Mariah, si tu me lis, sache que je suis parmi tes plus fervents admirateurs.
Tu devines que la chose au monde qui me tiendrait le plus à cœur serait que tu me consacres quelques instants d’intimité.
Tu me dédicacerais sans doute le préservatif.
Je n’ambitionne rien tant que de devenir un jour ton plus fidèle et respectueux serviteur.
Une reine servie par Richard III, quoi de plus naturel ?

2 décembre 2004

Europe et mécanique ondulatoire au PS

Avec une chance sur deux de me tromper, je prends le risque.
Les militants du PS français vont selon toute vraisemblance approuver par leurs votes le projet de la Constitution européenne.
Que l’on soit pour ou contre, c’est en fin de compte la base des socialistes français qui aura le dernier mot et qui départagera Hollande de Fabius.
C’est tout le contraire en Belgique. Les plus chauds partisans de laisser le populo à l’écart du pouvoir de décision se recrutent parmi les dirigeants bobos du PS.
C’est même une de leurs contradictions à ces ambitieux de la démocratie parlementaire. Ils veulent bien que nous les élisions sur des projets de politique générale, parce qu’ils savent bien qu’ils ne tiendront pas compte de notre avis.
C’est ce qu’ils appellent la démocratie par délégation du pouvoir à une représentation élue au suffrage universel tous les quatre ans.
En traînant les pieds, le PS n’a pas empêché les autres partis de réfléchir à la question d’un référendum. Cela devient gênant que jamais on n’ait consulté les gens sur les Traités européens, du premier qui fonda l’Europe, au dernier, le Traité de Nice..
La consultation en 2005 serait cependant symbolique, annonce Le Soir dans son édition de mardi. Lundi soir en Commission de la révision de la Constitution de la Chambre, une majorité semblait se dégager en ce sens. L’idée d’une consultation symbolique avait été lancée à plusieurs reprises par le Premier Ministre Guy Verhofstadt.
Symbolique signifie que quelque soit le résultat, ils approuveront la Constitution Giscard.
Il paraît que le référendum n’est pas inscrit dans la Loi. Pour organiser une consultation populaire, il faut préalablement revoir la Constitution. Ils craignent cela comme la peste. La raison secrète est que si une nouvelle Loi instaurait le principe du référendum, ils trembleraient de tous leurs membres que la Flandre ne se sépare du reste du pays par voie référendaire et donc légale.
La question posée lors de cette consultation pour rire, dont la date reste à préciser, sera : "Le Royaume de Belgique peut-il adhérer au Traité établissant une Constitution pour l’Europe ?" (oui / non).

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On le voit, pour se prononcer en connaissance de cause, on demande aux Belges une double connaissance : celle du projet Giscard et celle de la Constitution de l’Etat belge.
C’est dire comme on va battre le beurre.
C’est là-dessus que compte les socialistes pour argumenter leur volonté d’écarter les électeurs des pouvoirs de décision. Pour le PS, l’électeur est à la fois souverain et con.
Merci, on a compris depuis longtemps.
De la part d’un parti qui a pour vocation de défendre le « peuple », c’est un paradoxe supplémentaire.
A l’Europe, on a l’habitude aussi de se passer de l’avis des Européens. La Commission européenne n’est hélas pas élue par la population. Elle entérine une vision libérale de l’économie. Ce n’est pas un hasard si elle est de sensibilité néo-libérale... Si l’on avait procédé à un vote pour élire la Commission, la droite déchirée par son opposition interne dite « extrême » nationaliste et antieuropéenne, aurait normalement cédé la place à une Commission socialo-écologiste.
Une Constitution européenne devrait au minimum faire l’objet d’un débat démocratique entre les citoyens. Mais bon, la mystification, débutant sous Paul-Henri Spaak, un des pères fondateurs, s’est perpétuée jusqu’à nos jours.
Le public en a conscience. L’inutilité dans laquelle nous confine les décisions prises ailleurs, fait que nous nous sommes peu à peu désintéressés du processus d’élaboration ; et, ce sont ceux qui nous en ont dégoûté, qui s’en inquiètent !
Leur maladresse, en partie volontaire par amour du pouvoir, avec la volonté de ne pas le partager, surtout avec nous, est profondément regrettable, car l’Europe n’est pas une mauvaise chose en soi. La paix y règne depuis cinquante ans.
S’il est si difficile que cela de l’expliquer, c’est parce qu’elle a toujours eu un déficit démocratique qui profite à la théorie du libéralisme absolu.
Ils n’ont pas su nous la faire aimer, malgré leur propagande dès la maternelle, tant pis.
L’abstention record aux élections du 13 juin en France et ailleurs est un signe qui ne trompe pas.
Le débat sur la Constitution n’est pas clos, qu’ils se lancent, sans notre avis, sur des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Europe ! Autant la vocation européenne des pays de l’Est de l’Europe va de soi, autant inscrire dans des négociations un pays d’Asie Mineure sans que tous les pays d’Europe aient été intégrés est une monstruosité de plus. La Turquie admise, même dans dix ans, qui empêcherait Israël qui compte dans sa population trois quarts d’anciens européens, d’en faire autant ?
Nous reprendrions alors une bonne part du fardeau des USA qui tient ce pays dans un état de force incompatible avec son économie.
La boucle serait bouclée.
L’idée européenne aurait vécu.

1 décembre 2004

Incomplexe

Merde ! Quel con !... tellement avare qu’il a préféré se payer une tendinite plutôt qu’un godemiché !
Pourtant Choute, commerçante en Féronstrée lui avait bien dit :
« Fais attention, mon Pierre, t’es a capacité réduite. Tu saurais pas changé de voilure facilement. On se refait plus à soixante balais. »
Elle acceptait l’inévitable, Choute. Elle avait beaucoup perdu les dernières années de sa virtuosité à émouvoir le Gros. Les chutes de tension la minaient. Plus elle baissait pavillon, plus le Gros avait besoin qu’on lui recharge les accus et pas qu’en douceur, non, le fort ampérage au cul, tout de suite.
Choute aimait encore le Gros. On se lasse jamais du dernier témoin de l’impétuosité de la quarantaine, quand elle trompait Léon avec Pierre qu’était encore mince comme un fil et déjà beau parleur et qu’au fur et à mesure des progrès de l’embonpoint, on appela de moins en moins Pierre et de plus en plus le Gros.
L’après-midi de l’explication, ils étaient en pleine nostalgie, au temps où ils baisaient à l’étage, tandis que Léon servait les clientes au « Petit bonheur des dames », un prêt-à-porter en gérance.
Depuis, Pierrot avait pris du poids et pas qu’un peu et Léon quittait plus son fauteuil... Le Gros appelait sa panse la noix de coco, rapport à la rotondité et à la masse.
Son nouvel amour lui travaillait le cigare, dans les deux sens du terme.
« Tu vois, Choute, j’ai essayé d’être réglo avec toi, mais je l’aime Cri-d’amour, je l’aime ! Nom de dieu oui, je l’aime ! ».
Quelques jours plus tard, à la terrasse « Aux Ouhès », un chaud soleil inattendu donnait aux passants l’envie de s’asseoir pour mater à l’aise l’animation devant la Violette.
Choute pensait qu’il aurait mieux valu qu’il ferme sa gueule à propos de son grelot tardif pour Cri-d’amour, d’autant qu’elle avait été toute la semaine à l’évocation… les séances à l’étage, les dernières fois où elle ne simulait pas l’orgasme, puis les premières pannes à répétition du Gros… la déchéance ensuite, quand elle gueulait « Ah ! oui… c’est bon… » alors qu’elle avait la sensation épidermique de leur dégénérescence animale respective.
« Tu te rappelles la fuite d’eau du cabinet ? »
Le Gros n’avait plus de la mémoire que pour son dernier coup de la veille avec Cri-d’amour à son appart de Cointe.
Une entreprise où il laissait ses os à cause de l’extase perpétuelle de Cri-d’amour qui réagissait rien qu’à la claque du Gros sur son derrière rebondi. A la voir en feu pour si peu, le sexagénaire puisait dans ses réserves et comme dans sexagénaire il y a « sex »… il repartait vers un nouvel Austerlitz !...
- T’as la main ensorcelée, mon amour.
- Quoi ? Qu’est-ce que tu chantes ? Que j’ai la main ensorcelée ? Qu’est-ce que t’as, mon Pierre ?
- Pardonne-moi, Choute, je pense trop à l’autre… Elle dit que j’ai la main ensorcelée.
- Tiens, quelle drôle d’idée !
Choute ne lui avait jamais balancé qu’il avait le touché casanovien. Le cul gelé qu’elle avait, et lui plus de lampe à souder pour fondre le bouchon.
- Alors, et cette Cri-d’amour, elle vient ou pas ?
C’était une idée du Gros de présenter Cri-d’amour à la Choute.
Les derniers temps, le Gros, avant qu’il ne rencontre Cri-d’amour, avait parfois recours aux ambulantes qui rendent enfin tout le pittoresque à Liège sans effrayer les familles. Une agenouillée qui vaquait derrière la Grand-poste avait quelques temps ragaillardi notre homme. C’était une de ces malheureuses qui avait besoin du discours des autres pour exister. Elle était tombée de première avec le Gros. Qu’importe le lieu, l’effet produit sur une dame chatouillait son amour-propre. Elle lui donna la réplique avec l’enthousiasme d’une femme à qui on ne cause jamais que de détails techniques tarifés.
- Frida, comment elle prend la chose ?

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La Choute était au courant pour l’horizontale aussi. Pierre avait amené Frida dans sa Mercedes verte à l’appartement, alors que la Choute y était. Ils avaient sympathisé au point que Pierre avait trouvé le trio charmant.
- Faut être progressiste, hein, Pierrot ?
Le Gros était bien d’accord.
Cri-d’amour, avec un quart d’heure de retard, surgit de derrière la fontaine et se planta devant eux. Elle embrassa sans façon le Gros goulûment sur ses lèvres épaisses, à la façon des enfants qui sucent un cornet. Puis bredouilla quelques mots.
- Anatole me suit depuis huit jours. Il se doute…
Léon, quand l’écaille des yeux était tombée et qu’il avait su que la Choute s’envoyait son vieux copain Pierrot, s’était comme tassé sur lui-même, avait perdu le goût de la vente, était tombé malade sans que l’on sache ce qu’il avait. La force lui manquait pour repousser la poignée de main que l’autre lui donnait une fois la semaine à la fermeture du magasin avant de grimper à l’étage astiquer la Choute tandis que Léon restait dans son fauteuil derrière les coupes de tissu.
Anatole commençait la même maladie. Il rapetissait de jour en jour, perdait l’appétit, tandis qu’un léger tremblement agitait sa main droite.
Léon avait fini par se tirer une balle dans la tête. Le légiste avait mis cela sur le compte d’une dépression nerveuse foudroyante. Comme quoi, les histoires de cul montent parfois au cerveau.
Anatole n’en était pas encore là. Il jetait ses dernières forces dans des jeux de piste avec Cri-d’amour. Mais, elle les déjouait tous.
Le Gros et la Choute invoquèrent Léon, ses manies et son incompétence générale qui se traduisaient par des maladresses.
Une sorte de solidarité entre les deux femmes surgit à propos des maris. Le Gros n’avait jamais été marié. On enterra Léon pour la deuxième fois, en attendant Anatole. Puis, le silence gagna le trio.
Il faisait beau. On pensait à la vie devant soi.
La Choute se demandait ce qu’elle allait faire seule, puisque la main passait.
Ils noyèrent leur réflexion dans la limonade.
Frida ne savait pas que le Gros ne viendrait plus. Elle guettait sa venue en réfléchissant à ce qu’elle allait dire, depuis qu’elle avait appris à parler la bouche pleine.
Anatole, essoufflé, avait abandonné la poursuite place Saint-Jacques. De songer aux lendemains, lui donnait des vertiges.
Le Gros cherchait des mots de convention pour dire adieu à la Choute.
Cri-d’amour était de ces femmes dont l’ennui soudain succède aux passions les plus violentes. Et il lui sembla subitement, qu’elle était déjà étrangère à la femme amoureuse et empressée qu’elle était la minute avant, quand le Gros fit un pet sonore, qu’il en rougit de confusion. Le rire qui sortit de la gorge de Cri-d’amour ne lui appartenait plus.